Kirito souffla un grand coup. Il se trouvait sur un toit d'immeuble juste devant un grand parc de Karakura. Assit sur le rebord, il avait les jambes qui pendaient dans le vide et ses mains étaient posées dans son dos afin de le maintenir en équilibre. La course du soleil touchait à sa fin pour cette journée et la nuit commencerait donc bientôt à pointer le bout de son nez. Le jeune Shinigami observait le parc en contrebas. Même si le lieu commençait à devenir désert quelques personnes y traînaient encore. Des enfants plus convaincants que d'autres avaient du réussir à embobiner leurs parents pour rester jouer un peu plus longtemps, à moins que ce ne soit les parents qui, discutant ensemble, n'avaient pas vu l'heure passer. Ce spectacle insouciant amusait notre jeune héros qui regardait la scène avec un petit sourire au coin des lèvres.

Il se redressa un peu puis s'étira longuement. Il pensa alors au fait qu'il avait eu une rude journée de repos... Quelle ironie ! Il était censé prendre un peu de temps pour se décontracter car l'expérience qu'il menait avec la douzième division était pour le moins fatigante mais au final il avait à peine profité de quelques heures dans la matinée. Son rendez vous avec Ai et la capitaine de la cinquième division lui avait occupé une grande partie de la journée et ne s'était pas avéré reposant du tout. Par ailleurs, sa rencontre surprise avec le vice-capitaine de la seconde division en début de matinée lui avait donné matière à réflexion et les inquiétudes de ce dernier préoccupaient également Akihiko.

Il tenta une fois de plus de chasser de son esprit ses pensées. Il aurait tout le temps d'y réfléchir plus tard, après tout il devait profiter un peu de ce moment apaisant. Il regarda l'horizon qui se trouvait au dessus du parc et constata que le soleil venait de rencontrer la courbure de la Terre. Cette vue paisible enchanta le jeune Shinigami qui réussit l'espace d'un instant à se détendre. Kirito songea alors que l'autre n'était pas intervenu durant cette journée, finalement en soi cela représentait une journée tout à fait reposante ! Il n'avait pas eu à supporter le comportement grossier et déplacé de sa personnalité perverse...

Kirito était aujourd'hui satisfait de l'équilibre psychologique qu'il avait obtenu en arrivant au sein du Gotei 13. Ses deux personnalités auparavant toujours en conflit arrivait désormais à se mettre d'accord et à viser les mêmes objectifs – même si les motivations divergeaient fortement -. L'autre prenait toujours le contrôle de manière impromptue, mais il arrivait mieux à se tenir qu'auparavant et le mettait dans des situations un peu moins embarrassantes. De plus, quelque part au fond de lui même Kirito savait que cette autre personnalité n'était qu'une version de lui-même, il ne pouvaient pas haïr l'autre ni même lui en vouloir pour la simple et bonne raison qu'ils étaient une seule et même personne.

Perdu dans ses pensées et face au soleil couchant notre jeune héros fut brutalement ramené à la réalité. Quelque chose venait de bouger, une vibration caractéristique venait de lui parvenir. Akihiko n'était pas doué pour détecter le reiatsu mais il n'était pas non plus incompétent et il venait de constater la présence de cette énergie spirituelle non loin de lui. Contrairement au reiatsu du vice-capitaine, qu'il avait rencontré le matin même, l'énergie qu'il sentait actuellement semblait différente. Il en émanait une sensation de ... froid. Ne parvenant pas à identifier clairement la source du reiatsu Kirito se releva et s'éloigna du bord de l’immeuble. Quelque chose clochait il le sentait, il n'avait pas à faire à un Shinigami cette fois.

Kirito ne céda pas à la panique car il avait un sang froid à toute épreuve, cependant il réfléchit rapidement. Il était actuellement dans son Gigai donc totalement désarmé. Devait-il reprendre son apparence ou rester tel quel ? Certes il ne pouvait pas actuellement se battre pleinement mais d'un autre côté sortir du Gigai maintenant pourrait être interprété comme une menace et cela pourrait provoquer un combat inutile. Il décida finalement de ne pas courir ce risque et donc de rester dans le Gigai. Cependant, il plongea sa main dans le sac en bandoulière qu'il avait et en sortit un Gikongan qu'il plaça dans sa bouche sans l'avaler. Si les choses tournaient mal il n'aurait qu'à gober la petite pilule pour que l'âme artificielle dénommé Alfred puisse s'enfuir avec le Gigai tandis qu'il pourrait se battre même s'il n'en avait pas l'intention. Il regretta l'espace de quelques secondes que les Gikongan expérimentaux, qui expliquaient sa venue à Karakura, ne soient pas encore totalement fiable. Avec l'un d'eux il aurait été plus serein.

L'autre commença soudainement à s'agiter mais Kirito refusa de lui céder la place. Droit debout, les yeux rivés sur le soleil, notre jeune héros avait tous les sens en alerte et il sentait toujours la présence proche du reiatsu sans pouvoir le localiser. Il décida de ne pas parler pour éviter toute réflexion déplacée et il attendit. Qu'allait-il voir apparaître ? Un Fullbringer ? Ou bien un Arrancar peut être... Dans les deux cas la rencontre allait être tendue.

Il est dit que l’on ne peut pas distinguer une âme utilisant un Gigai. Que ce corps d’emprunt est capable de faire disparaître le Reiatsu de son possesseur, ce qui empêche ces derniers de faire appel à leurs talents. Que ce soit la maîtrise du Zanpakutô, du Kidô ou de toute autre technique à base d’énergies, cette parure empêche l’utilisation des dons particuliers. Et c’était vrai… Real parcourait les rues de Karakura à la recherche de cette personne et ne parvenait toujours pas à lui mettre la main dessus. Pourtant, son indic avait été clair et ses talents ne permettaient pas de douter de lui. Mais comment retrouver un Shinigami qui se terrait dans un corps artificiel ? Comment le localiser alors que cela lui était impossible ? Pour cela, elle ne comptait que sur deux choses : la chance et Elias. Elle savait qu’elle tournait en rond. Elle aurait très bien pu être face à lui qu’elle ne l’aurait jamais su. Et c’était quelque chose qui commençait réellement à l’agacer.

Et alors qu’elle s’apprêtait à quitter les lieux, son oreillette grésilla, laissant filtrer la voix d’Elias. Son informateur était comme toujours caché dans le coin, suivant Real avait discrétion et lui apportant son aide dans les situations qui l’exigeait. L’échange fut rapide et déjà elle dirigeait son regard dans la direction qu’il venait de lui indiquer. Et elle l’aperçue. Etait-ce vraiment un Shinigami ? Cette personne avec son sac ressemblait au commun des mortels. Rien ne filtrait. En dehors d’un détail somme toute important mais qu’elle n’aurait jamais vue si elle n’avait pas été aidé : l’homme semblait troublé, dans l’attente. Ce n’était en rien une preuve mais avec ce qu’elle savait, le coup méritait d’être tenté.

C’est pourquoi elle se dirigea vers lui, arborant un visage impassible, essayant de contenir la haine qu’elle portait à cette espèce absurde. Chaque fois, c’était le même refrain. Chaque fois, ils se justifiaient en se cachant derrière leur nombre, estimant qu’ils ne pouvaient être partout. Qu’importe qu’ils aient raison ou tort… Mayer avait perdue sa famille à cause de la négligence des Shinigamis et elle ne pouvait que leur en vouloir. Responsables ou non, elle avait décidée qu’ils seraient sa cible. Une Mayer ne revenait jamais en arrière. S’arrêtant à quelques pas de l’être en question, elle tentait de voir s’il en était un ou pas. Bien qu’elle soit belle, le visage qu’elle arborait ici-même reflétait seulement son humeur. Froid, calculateur. Comment être persuadée ?

- Si mes informations sont exactes – et il n’y a pas de raison que ce ne soit pas le cas – vous n’êtes pas ce que vous semblez paraître. Ainsi, je me permettrais de vous poser la question une seule fois. Selon ce que vous me direz, je déciderai de vous croire ou non.

Sa main fouilla rapidement dans sa veste pour en extirper la crosse de son Glock, arme à feu qu’elle adorait et qui lui rendait bien des services. S’il était simple mortel, il paniquerait à la vue d’une femme le menaçant si aisément. S’il était autre chose, alors il ne pourrait craindre cette arme humaine. Bien entendue, ce qu’elle gardait pour elle, c’est que cette arme était tout autant capable de tuer un Shinigami. Sa maîtrise des âmes lui permettant évidemment de manipuler les balles pour s’en faire des alliées.

- Qu’êtes-vous véritablement ?

De nouveau le grésillement. Et la voix d’Elias.

- Il s’agit bien d’un de ceux qui parcourent la ville depuis peu. Je suis formel. Bien que son corps spirituel ne laisse rien ressortir. J’ai eu le loisir d’en suivre certains… Soyez prudente, Mademoiselle Mayer. Nous ne connaissons pas les raisons de leur présence en ce bas monde.

Akihiko attendait patiemment tout en regardant le soleil descendre et se faire dévorer par la courbure de la Terre. Le ciel bleu se tintait d'une couleur rose tandis que les nuages commençaient à prendre une couleur orange car ils reflétaient les lueurs de l'astre qui disparaissait progressivement. Cette combinaison de couleur était absolument superbe et le jeune Shinigami était ravi d'assister à un tel spectacle qu'il ne pouvait pas observer aussi souvent qu'il le souhaitait. Alors que quelques secondes s'écoulèrent paisiblement, son regard balaya les environs et il la vit. Il murmura alors pour lui même.

- Fullbringer...

Une jeune femme le fixait et commençait à venir vers lui. Ses yeux couleurs azur semblaient le transpercer mais notre jeune Shinigami soutint le regard sans la moindre animosité en essayant d'apparaître comme le plus neutre possible. Il savait que c'était elle, il en était quasiment persuadé et comme elle semblait n'avoir d'yeux que pour lui cela balaya ces derniers doutes. Il détailla ensuite rapidement la femme, elle était relativement grande et possédait une silhouette élancée qui se trouvait embellie par une magnifique et longue chevelure brune ramenée en queue de cheval. Cependant, sous sa beauté apparente Akihiko se doutait qu'il y avait une personnalité des plus dure car son visage était sérieux et il semblait masquer en grande partie toutes ses émotions à tel point qu'il avait du mal à lire dessus.

Notre jeune héros était encore hésitant quant à la démarche à suivre... La présence d'un Fullbringer ne lui permettait pas de prendre une décision. Ces derniers pouvaient s'avérer autant être d'excellents alliés que de furieux ennemis et à l'heure actuelle il ne parvenait pas à déterminer les motivations de la jeune femme. Il fit rouler entre ses dents le Gikongan et décida alors de ne pas l'avaler pour l'instant. Il n'en savait pas assez. Par ailleurs, vu qu'il était dans un Gigai, il ignorait si elle venait vers lui par hasard ou en toute connaissance de cause...

Il la laissa alors approcher en étant patient et ne tenta rien. Il profita également de la douceur des rayons de soleil face à lui pour se détendre. Finalement la beauté s'arrêta à quelques pas de lui masquant partiellement le soleil qui se couchait et lui donnant un air encore plus charmant mais quelque peu...surréaliste. Alors qu'elle était si près il parvint finalement à coller une émotion sur son visage. Il voyait là comme une forme de doute et de méfiance et cette intuition fut aussitôt confirmée lorsqu'elle le héla alors d'une manière des plus singulières qu'il soit. Non seulement elle semblait bien venir pour lui mais en plus elle semblait parfaitement savoir à qui elle avait affaire malgré le fait qu'il était dans son Gigai.

Avant qu'Akihiko ne puisse répondre à la question posée, il la vit alors sortir une arme à feu – était-ce le nom de cet objet terrestre ? – qui avait le mérite d'être l'un des outils de morts favoris de la race humaine. Il faillit aussitôt mordre dans son Gikongan mais au dernier moment il se ravisa lorsqu'elle lui demanda ce qu'il était réellement. Quelque chose l'étonna et il ne chercha pas à le masquer sur son visage. Pour quelles raisons s'avérait-elle aussi agressive ? Il voulait en savoir plus avant de faire un choix, c'est pourquoi, après quelques secondes, il fit rouler le Gikongan jusque derrière une dent de sagesse et se décida à répondre. Il regarda son opposante droit dans les yeux avec un sourire timide, inclina légèrement la tête en signe de respect puis annonça sans détour.

- Enchanté, je suis un Shinigami. Mon nom est Kirito Akihiko et je suis le quatrième siège de la douzième division.

Il se doutait que la femme face à lui comprenait parfaitement à qui elle avait affaire alors il ne servait à rien de lui mentir, cela n'aurait fait qu'aggraver la situation. Il continua à sourire sans chercher à paraître pour autant sûr de lui ou moqueur comme l'autre l'aurait fait. Il souriait avec sincérité, même si l'on venait de le menacer il n'allait pas s'énerver aussitôt et attaquer sans considération ce n'était pas son genre. Actuellement il souhaitait juste mieux connaître la personne face à lui. En plus c'était rare de croiser un Fullbringer et il était curieux de savoir pourquoi celle-ci le menaçait.

- Maintenant que vous me connaissez, et si ce n'est pas indiscret, puis-je espérer avoir en retour votre nom ? Par ailleurs, j'ignore pourquoi vous braquez cette arme sur moi mais je n'ai pas l'intention de me battre. Si je vous ai fait du tort de quelques façons que ce soit je m'en excuse sincèrement. Je suis ici dans le but de me détendre et de profiter de la vue quelques secondes. La Terre est bien plus agréable que la Soul Society...

Sur ces paroles il indiqua d'un signe de tête le couché de soleil. L’honnêteté de Kirito pouvait donner l'impression que le jeune Shinigami était totalement naïf mais il était seulement gentil et plein d'attention. Par ailleurs, même s'il gardait à l'esprit qu'il était sans aucun doute en danger il sentait que la personne face à lui était tourmentée, et ce malgré le fait qu'il ne la connaissait pas. Kirito s'inquiétait véritablement plus du sort de cette charmante jeune femme que de sa propre sécurité. Aussi étonnante et tendue qu'était la situation notre jeune héros voulait seulement parler avec la charmante Fullbringer...

Etait-ce indiscret que de lui répondre ? Probablement pas. De toute façon, cet homme n’était pas le premier Shinigami appartenant à la Soul Society qu’elle croisait dans cette ville et les autres connaissaient déjà son nom. S’ils mettaient en commun leur dossier – et elle ne doutait pas un instant que ce soit le cas – ils trouveraient de toute façon son nom. Ainsi, inutile de ne pas le lui dévoiler.

- Je suis Real Mayer. Membre du clan du même nom. Et si je suis sur la défensive, c’est seulement parce que je n’ai aucune confiance en ceux de ta race. Je sais comment vous traitez vos affaires et ceux que vous considérez comme des ennemis. Je préfère rester prudente.

D’autant qu’elle se dressait d’elle-même comme une ennemie de leur monde. Elle les haïssait et se donnait beaucoup de mal pour les traquer et les détruire. Bien que ceux qui arrivaient directement de la Soul Society soient d’un tout autre calibre, elle le savait. C’est pourquoi elle préférait mettre un peu d’eau dans son vin. Pour le moment. Non sans rester sur ses gardes. Ne connaissant pas véritablement les mœurs de ces Shinigamis, elle ne parvenait pas à saisir la raison de cette apparence humaine. Pourquoi se mettre dans le corps d’une marionnette alors que cela entravait de toute évidence leur pouvoir ? Sans doute pour passer inaperçu. Et cela fonctionnait terriblement bien, il est vrai.

Quoi qu’il en soit, les excuses hâtives du Shinigami l’agaçaient. Agissait-il ainsi car il le pensait ou tout simplement pour tenter d’amadouer la jeune femme ? Feindre le regret n’était pas difficile pour ceux qui mentaient régulièrement et Real ne pouvait déceler le vrai du faux. Elle allait devoir redoubler de prudence. Que la terre soit plus agréable que leur monde, elle n’en doutait pas un instant. Il y avait trop de Shinigamis qui parcouraient la ville pour que cela ne soit que du ressort d’une mission. Pour le plaisir alors ? Une donnée qu’elle avait du mal à intégrer tant son impression sur ce peuple était corrompue. Son seul moteur, c’était évidemment cette hargne qui l’habitait. Elle ne connaissait rien d’autre.

- Je ne connais pas ton monde. Mais sur ce point, je veux bien te croire. Pourquoi cette apparence ? Pourquoi se cacher si tu ne cherches qu’à profiter des bienfaits de cette ville ?

Elle était réellement interloquée. Sans véritablement s’en rendre compte, elle s’était reculée d’un ou deux pas, lâchant toutefois la crosse de son Glock. Si nécessaire, elle saurait remettre la main dessus en quelques secondes. Inutile de se montrer trop agressive tant qu’elle ne connaissait pas l’état des forces en présence. Si sa haine dominait son cœur, elle restait suffisamment saine d’esprit pour ne pas se jeter dans un piège. La raison primait sur le devoir. Pour le moment. Comme s’il lisait dans son âme, Elias reprit la parole, toujours par le biais de l’oreillette.

- Vous m’étonnez, Mademoiselle Mayer. Il y a encore peu, j’aurai été obligé d’intervenir pour vous éviter de le tuer. J’en suis heureux.

Elle s’en doutait. Ses employeurs ne désiraient pas qu’elle fasse trop de vagues. Si elle devenait gênante, Elias interviendrait. La prudence s’imposait d’autant plus.

Real Mayer... Ce nom se grava dans la mémoire de Akihiko qui continuait à fixer la femme face à lui. Il était relativement surpris qu'elle lui ai répondu avec ce qui lui semblait bien être de la franchise. Elle disait appartenir à un clan du même nom. Le clan Mayer donc... Kirito avait beau fouiller son esprit il constata qu'il n'avait absolument jamais entendu parlé de ces gens et il ne savait pas s'il fallait considérer cela comme quelque chose de bien ou au contraire de très inquiétant... Il repensa au vice-capitaine de la seconde division qu'il avait rencontré le matin même par hasard et se souvint de son air contrarié. Il y avait-il là le moindre lien ? Ce serait vraiment étonnant... Le jeune Shinigami chassa de ses pensées ces idées car elles ne lui étaient actuellement d'aucune utilité. Pour l'instant seul Real l'intéressait.

Même si cela ne semble pas vraiment réciproque je suis heureux de vous rencontrer mademoiselle Mayer. Vous semblez très méfiante à l'égard des shinigamis, j'ignore pourquoi mais je me doute qu'il doit y avoir une bonne raison à cela, tous ne sont pas irréprochables... Cependant, vous n'avez rien à craindre de moi, je n'ai vraiment pas l'intention de vous faire du mal ou vous manipuler.

La beauté troublante de la jeune femme semblait de plus en plus détonner avec son caractère. Elle n'avait non seulement pas hésité à le menacer sachant ce qu'il était mais en plus elle ne cherchait pas à masquer ses craintes et sa haine envers la race des shinigamis. Par ailleurs, elle semblait en savoir long sur leurs méthodes ainsi que sur les Hollows, ce qui, à ce niveau, n'étonna presque pas notre jeune héros.

En continuant à réfléchir et à étudier la situation Akihiko comprit alors que la jeune femme n'était pas seulement tourmentée, elle semblait être à un autre niveau de sentiments. Perdue. Oui voilà elle semblait irrémédiablement perdue comme si elle s'était noyée dans la haine qu'elle semblait porter aux shinigamis. Comment cette jeune femme avait pu en arriver là ? Son discours montrait clairement qu'elle en voulait aux dieux de la mort pour une raison personnelle mais quelle pouvait être cette raison ? Cela restait un mystère. Kirito ne put s’empêcher de penser à nouveau au clan dont elle avait fait mention. Il espérait que ce clan entier n'était pas regroupé sous une bannière anti-shinigamis...

Lorsqu'elle reprit la parole Kirito constata avec soulagement qu'elle avait rangée son arme à feu. Pour la première fois, il commença presque à penser qu'il pourrait s'en sortir sans fuir ou combattre. Il remarqua également qu'elle avait légèrement reculé, sans doute par crainte ou méfiance de ce qu'il était réellement. Elle ne faisait pas confiance aux shinigamis, mais pouvait-on réellement la blâmer pour cela ? Kirito lui même se méfiait de certains de ces semblables alors il parvenait clairement à comprendre qu'une humaine pouvait se méfier d'eux... Lorsqu'elle termina sur des questions concernant son Gigaï il fut cependant réellement surpris. La jeune femme semblait curieuse et pour la première fois il émanait d'elle un sentiment qui collait avec sa nature humaine. Akihiko se demanda jusqu'à quel point il pouvait parler sachant pertinemment que s'il lui donnait des informations précieuses elle pourrait s'en servir contre d'autres shinigamis. Il se décida alors à parler.

Je préfère savoir que vous ne connaissez pas mon monde sinon cela signifierait que vous auriez perdu la vie or je ne vous le souhaite pas. Quant à mon apparence actuelle sachez que je ne cherche pas à me cacher. A vrai dire je suis ici sur ce toit pour profiter du couché de soleil uniquement car je suis venu pour d'autres raisons à Karakura. Je ne faisais que prendre une légère pause. Le corps artificiel dans lequel je me trouve me sert juste à me déplacer et interagir avec les vivants sinon je n’apparais même pas à leurs yeux...

Kirito ne put ensuite s'empêcher de sourire avant de poursuivre.

Sur un plan plus personnel j'apprécie ces corps car ils sont plus sensibles face à la diversité de sensations qu'offre ce monde comme par exemple la chaleur de ces rayons de soleil... Par ailleurs, je trouve également plaisant de pouvoir me vêtir d'autres choses que les tenues ternes et uniformes des shinigamis.

Le jeune Shinigami adressa un signe de tête amical à son interlocutrice.

Vous auriez d'autre sujet de questionnement ? Vu que j'ai un peu de temps je serais partant pour discuter un peu avec vous. Même si vous semblez m'en vouloir il n'en est pas de même pour moi. Je vous trouve même presque... - il hésita sur le terme – sympathique.

Pour souligner le fait qu'il n'avait aucune mauvaise intention il se déplaça légèrement et se rassit sur le rebord de l'immeuble face au soleil qui disparaissait tranquillement. D'un léger geste de la main et sans être brusque il invita Real à en faire de même. Même s'il semblait légèrement baisser sa garde son Gikongan se trouvait toujours prêt à être utilisé si les choses tournaient mal. Il regarda la jeune femme se demandant comment elle allait réagir. Il se doutait que cela lui demanderait un énorme effort, peut être même insurmontable, pour s’asseoir à côté de ce qu'elle considérait comme un ennemi. Akihiko avait du mal à se dire qu'on pouvait le craindre lui qui ne ferait pas de mal à une mouche et encore moins à une femme...

Dire qu’elle n’avait rien à craindre, c’était sans doute parler trop vite. Car malgré ce qu’il disait, malgré ce qu’il pensait, sa manière de s’adresser à elle était déjà une forme de manipulation. Pacifique bien évidemment, mais cela ne changeait pas ce que c’était réellement. Pourtant, Real devait admettre qu’elle était surprise. Le comportement de cet homme ne ressemblait en rien à celui qu’elle avait déjà remarqué auprès des autres. Il n’était pas spécialement belliqueux alors même qu’elle n’y avait pas été avec le dos de la cuillère. Cela eut pour effet de la tempérer quelque peu. Peut-être pas pour longtemps mais la trêve était installée. Curieusement.

Les explications suivantes eurent raison de son étonnement. Ce Shinigami souhaitait donc seulement partager les sensations qu’éprouvaient les humains ? Real devait admettre qu’elle ne connaissait que peu de choses sur ce que ressentaient les Shinigamis. Seule la traque avait fait partie de son quotidien et les sentiments de ses cibles ne comptaient pas. Mais ici, au cœur de cette ville particulière, elle était obligée d’intégrer de nouvelles données. Sa vie en dépendait. Et son regard, même s’il ne changeait pas, intégrait toutefois plus d’éléments que par le passé. Elle tardait trop. Et cela jouait sur son humeur. Car elle savait ces changements inéluctables. Et sa colère gonflait à chaque fois pour chasser toute notion de bonté : ces Shinigamis ne pouvaient en posséder. Se mentir à elle-même était une sécurité bien entendu. Et elle n’était pas encore disposée à oublier. Elle ne le serait jamais.

- Je… Non !

Un instant, elle s’était laissé embobiner. Mais rapidement, elle reprenait le jeu à son compte. Ce n’était pas à elle d’être déstabilisé. Mais à lui. Il n’avait peut-être rien à se reprocher mais en arborant le costume des Shinigamis, il embrassait le passé de ses prédécesseurs. Les fautes de ces derniers. Il ne pouvait en être autrement. La vengeance était un plat indigeste mais la maintenait en vie. Même si pour cela, elle devait vendre son âme au diable, morceau après morceau.

L’homme s’installa ensuite, l’invitant à le rejoindre. Le spectacle était clairement beau. Mais l’âme noire ne voyait ici qu’un léger répit. Et aussi agréable que ce répit puisse être, il restait éphémère. Elle se rapprocha mais gardait une distance logique entre eux. Et elle ne s’installa pas, restant légèrement en retrait. Un seul mot résonnait dans son crâne. Sympathique ? Elle ? Elle ne pouvait le laisser dire ça.

- En ce monde, tout est illusoire. Les apparences sont trompeuses et permettent seulement aux prédateurs d’approcher au mieux leur proie. La nature est ainsi. Et les Shinigamis sont les premiers concernés.

Elle n’était évidemment pas claire dans ses explications, dans ses justifications. Elle connaissait la mission des Anges de la Mort et savait à quel point elle était importante. Libérer les âmes, leur offrir une route sécurisée pour qu’ils rejoignent l’autre monde. Elle savait aussi que sans eux, une grande majorité de Hollows seraient là à parcourir les mondes pour se nourrir de ces âmes innocentes. Pourtant, les histoires qu’on lui avait racontées étaient toutes unanimes. La Soul Society n’acceptait aucune ingérence dans ce qu’ils considéraient être leurs affaires. Et au nom de l’équilibre, dont ils étaient évidemment les seuls à percevoir la frontière, ils se disaient juge et bourreau. Les Quincy en avaient fait les frais. Tout comme d’autres humains à pouvoir. De quel droit décidaient-ils de qui peut vivre ou mourir ? Le clan Mayer condamnait cet asservissement. Cela en était un, sans le moindre doute. Et elle était devenue leur arme, leur porte-parole. Celle qui neutraliserait l’emprise des Shinigamis là où on l’envoyait. Mais jamais elle n’avait vue une ville comme Karakura, avec autant d’âmes éveillées. Ici, son travail était presque inutile. Chaque shinigami mort était immédiatement remplacé. Un vivier difficile à contrôler. Elle lâcha alors ces quelques mots sans même le contrôler. Elle le regretta aussitôt. Mais trop tard.

- Je n’ai rien contre toi… Seulement je haïs ce que tu représentes. Je hais cette arrogance qui caractérise ton peuple. Et je n’aspire qu’à voir disparaître ceux qui se prétendent les protecteurs de ce monde alors qu’ils n’agissent que pour leurs intérêts. Combien d’innocents tués dans vos guerres éternelles ?

Son père. Sa mère. Victimes collatérales de cette rixe intemporelle. Et qu’importe qu’on lui dise que cette guerre est là pour les protéger, les faits étaient indiscutables : des innocents subissaient. Il était simplement temps de porter cette guerre au-delà des frontières. Et Real serait un instrument des Mayer. Quitte à y laisser la vie.

Kirito constata, comme il s'en était douté, que la jeune femme ne s'installa pas. Cependant, il la vit clairement s'approcher un peu ce qui en soit représentait déjà quelque chose. Elle semblait également s'être détendue à moins qu'elle ne cherchait à le tromper mais il en doutait. Il fixa le visage de son interlocutrice, remarquant qu'au fur et à mesure de la discussion son expression devenait de plus en plus humaine. Il parvenait désormais à y lire des émotions sans réussir à les identifier clairement car la jeune femme semblait tiraillée, en proie à un conflit interne.

Akihiko se figurait qu'une part d'elle devait vouloir le détruire tandis qu'une autre part était indécise pour une raison qui lui échappait. Cependant, c'était désormais à cette seconde part qu'il souhaitait parler car l'autre semblait trop perdue dans la haine... Lorsqu'il lui avait demandé si elle avait de nouvelles questions il avait pris conscience de cette hésitation, elle avait voulu lui en demander plus mais quelque chose l'avait brusquement retenue.

Kirito tourna la tête vers le soleil qui allait bientôt disparaître. La jeune femme reprit alors la parole en lui expliquant que tout pouvait être illusoire. Il était totalement d'accord avec elle, la preuve l'autre pouvait survenir à tout moment et le corps frêle de notre jeune héros deviendrait une véritable arme de combat, lui n'aurait pas eu la patience de parler à Real, il l'aurait sans aucun doute provoquer en duel immédiatement ou aurait essayer de la courtiser à ces risques et périls. Cette idée fit sourire Akihiko. Il souhaita alors dire quelque chose mais la jeune femme enchaîna avec de nouvelles paroles très différentes qui résonnèrent dans la tête du jeune Shinigami.

Ces mots bien que sévères étaient emplit d'une grande sagesse et sincérité à tel point que Kirito ne put masquer son étonnement. Elle n'avait rien contre lui personnellement mais juste contre ce qu'il incarnait. Il est vrai que les shinigamis avaient un rôle important, indispensable même mais il était également vrai que ce rôle pouvait parfois échouer voir entraîner des dommages collatéraux qui impactaient de nombreuses vies. Il découvrait alors que la femme face à lui n'était pas entièrement noyé dans la haine, cette part d'elle qui était hésitante devait en réalité être la véritable Real Mayer celle qu'elle était avant que toute cette colère ne se concentre dans ce corps et cet esprit sans doute trop petit pour la contenir.

Kirito se tut quelques instants enregistrant ces précieux mots dans sa mémoire, le soleil au loin disparut, les derniers rayons lui avaient laissé une sensation de chaleur bienveillante. Il était dans une situation bancale, probablement très dangereuse, mais là à cet instant il était heureux. Il leva ensuite la tête et fixa le ciel et les quelques étoiles naissantes. Ses pensées se tournèrent brusquement vers Aizen et sa trahison puis vers Uragami le vice-capitaine de la seconde division rencontré un peu auparavant. Ce dernier bien que cherchant juste à se renseigner pour protéger le Gotei 13 usait sans aucun doute de méthodes peu scrupuleuses qui pouvait s'avérer dangereuse au final. Notre jeune héros soupira alors.

Vous avez entièrement raison... Bien trop de personnes innocentes on payé le prix de notre tâche... Notre rôle est important mais il nous rend aussi anormalement puissant et certains d'entre nous deviennent trop vite arrogant. Les règles instaurées par l'organisation des shinigamis sont justes mais utilisées à mauvais escient ou alors mal interprétées elles peuvent devenir plus néfastes que bénéfiques.

Kirito se releva. Il avait fait un choix, un choix qui lui coûterait peut être la vie mais il n'avait pas peur de disparaître s'il le faisait pour une cause juste. Il entendit presque l'autre hurler à l'intérieur de sa tête de ne pas le faire mais il l'ignora. Akihiko retira lentement le Gikongan de sa bouche et le rangea dans ses affaires sans geste brusque puis il avança déterminé vers Real. Il plongea son regard argenté dans l'immensité et la froideur du regard azur de la femme face à lui et continua à marcher vers elle. Il s'arrêta à moins d'un mètre d'elle avec un air déterminé.

Même si vous nous considérez comme vos ennemis je reconnais la sagesse de vos propos Mademoiselle Mayer... Au fond de vous je sens que vous êtes une bonne personne. En d'autres circonstances nous serions sans doute amis mais je pense que la barrière qui nous sépare actuellement est pour l'instant trop grande.

Il adressa un sourire franc et pleins de gratitude à la jeune femme puis poursuivit.

Vous détestez ce que j'incarne mais pas qui je suis. C'est pourquoi je voudrais vous demander une faveur. Si jamais un jour votre haine envers ma race atteint son paroxysme que ce soit pour une bonne raison ou non venez me trouver et affrontez moi. Déversez votre colère sur moi plutôt que sur l'intégralité des miens, voici la faveur que je vous demande.

Sur ces paroles le quatrième siège tendit une main vers la jeune femme en vue de sceller cette faveur, il était maintenant sans aucune défense et totalement à la merci de la Fullbringer. Allait-elle lui serrer la main ? Ou alors lui cracher au visage sa haine et le tuer comme elle avait du le faire avec tant d'autres shinigamis auparavant... Il ne pouvait plus faire machine arrière mais il en était totalement conscient. Aider la jeune femme face à lui, voilà la seule motivation qu'il avait à l'esprit en cet instant et qui le faisait sourire sincèrement et chaleureusement à la charmante jeune femme.

Plus la discussion s’enlisait, moins Real avait l’impression de dominer les débats. Ses arguments étaient réels, fondés sur des faits. Mais jamais elle ne se serait attendue à voir un Shinigami reconnaître ses fautes. Tout du moins celles de ses prédécesseurs. Etait-ce seulement cet homme qui différait des autres ou tout simplement la majorité des Shinigamis qui évoluaient avec le temps ? Elle n’aurait su le dire. Même si ses précédentes rencontres ne s’étaient jamais passées ainsi. Deux parts d’elle se combattaient. La première qui souhaitait la mort de cet homme, maintenant. La seconde qui était plus tempérée, qui avait presque envie de croire qu’ils n’étaient pas tous mauvais. Mais comme à l’accoutumée, la première grignotait du terrain sur la seconde, un véritable poison qui ne laissait pas sa chance à ces Anges.

Alors que l’être se relevait pour se rapprocher, Real ne sut comment réagir. D’instinct – on ne pouvait renier une vie entière à se protéger sans posséder quelques réflexes – sa main s’était figée sur le pendentif qu’elle portait autour du cou. Un pendentif particulier qui était en réalité le symbole de son pouvoir. Celui par lequel elle s’exprimait réellement. Comme un coup de semonce, le vent souffla, la température chuta de quelques degrés en un rien de temps. Une aura azurée l’enveloppait désormais. C’était presque invisible. Mais elle parvint à se contrôler, tout en gardant son porte-bonheur en main. Sait-on jamais.

Le regard de cet homme avait quelque chose de déstabilisant. De profond. Et Real savait qu’il ne lui mentait pas, qu’il était sincère en s’exprimant de la sorte. Ou alors particulièrement doué pour mentir… Elle n’excluait jamais rien. Il avait raison : le fossé qui la séparait de son espèce était trop important pour être comblé. Pas en si peu de temps, pas avec de simples paroles. Et si elle semblait pouvoir se fier à ce Shinigami, elle savait aussi qu’il n’était sans doute qu’un simple soldat. Et que de fait, il se devait de respecter une hiérarchie. Eux seuls décidaient. Et le mal venait sans doute de ces têtes pensantes. Elle reprit peu à peu contenance. Sans doute que, inconsciemment, le froid qui avait prit possession de ce toit la rassurait. Son visage ne s’adoucissait pas. Pourtant elle ne fut pas aussi cassante lorsqu’elle lui répondit :

- Il s’agit là d’une faveur que je ne peux satisfaire. Ma haine ne pourra jamais être plus forte celle que je porte à ce jour à ton peuple. Des Shinigamis sont déjà morts pour s’être dressés sur ma route et il y en aura d’autres. Beaucoup d’autres. Je suis navrée… Mais comme tu as ta mission, j’ai moi aussi quelque chose à accomplir.

Le sourire de cet homme, sa main tendue… Autant de choses qui perturbaient la jeune femme au plus profond de son être. Mais il ne fallait pas être naïf. Une vie à maudire les Shinigamis ne pouvait être effacée aussi facilement. Même s’il était plein de bonne volonté. En expliquant ce qu’elle avait déjà fait, ce qu’elle comptait encore faire, elle souhaitait montrer au Shinigami qu’elle n’était pas cette personne qu’il voyait en elle. Pas de compassion, pas de pardon. La glace est impassible et ne réfléchit pas. Elle était la glace. La main tendue ne serait pas prise aujourd’hui. Real se recula de plusieurs pas, accélérant même un peu la cadence. L’homme n’avait été ni mesquin, ni calculateur. Mais il ne pouvait rattraper les erreurs des autres si facilement.

Le choc entre le froid qui se dégageait d’elle et la température réelle venait de générer une sorte de légère brume. Rien de bien consistant mais la jeune femme comptait en profiter. Peu à peu, la brume gagnait l’intégralité de l’endroit, lui permettant de se soustraire de la vue du Shinigami. Et c’est là que, juste avant de partir, elle lui glissa ces derniers mots. Avant de s’évanouir dans la ville de Karakura.

- Nous nous reverrons. J’en suis certaine. Mais ne te dresse jamais entre eux et moi.

Une simple mise en garde. Plus pour elle que pour lui en vérité. Elle voulait seulement croire qu’elle pourrait s’occuper de cet homme s’il cherchait à l’arrêter. Mais à ce moment précis, elle se savait incapable de le faire. Pour la première fois depuis longtemps, un Shinigami était parvenu à la faire douter. Et cette marque de faiblesse ne devait jamais arriver aux oreilles de ses employeurs… Jamais.

Akihiko était près de cette femme dangereuse mais il ne ressentait que de la bonté envers elle, il la savait forte et pleine de détermination menée par une quête vengeresse mais il voulait croire qu’une paix pouvait être momentanément instaurée. Il sentit également l’air se refroidir autour de lui, était-ce là le pouvoir de la Fullbringer ? Il remarqua alors seulement qu’elle avait les doigts refermés sur le pendentif qu’elle portait autour du cou. Il semblait que la puissance de l’humain se dégageait de cet objet. Au fur et à mesure du temps il lisait de plus en plus de sentiments sur son visage et sur son attitude, il la voyait clairement hésiter et il comprenait également que cette indécision semblait la troubler de plus en plus. Elle semblait autant avoir peur de lui que d’elle-même et de ce qu’elle pouvait faire.

Lorsque la réponse de la jeune femme tomba il ne s’en offusqua pas, il ne se défendit pas et ne chercha pas à lui faire changer d’avis. Il était vraisemblablement trop tôt encore, pour le moment sa part pleine de haine prenait le dessus et lui empêchait de saisir cette main qu’il lui tendait. Lentement il laissa son bras revenir le long de son corps, son sourire ne s’effaça pas pour autant. La discussion était désormais close et il le comprit lorsqu’il vit que la jeune femme commençait à reculer doucement. L’air continua à se refroidir et une sorte de brume émergea soudainement autour de Real. Il ne chercha pas à la retenir, son choix avait été fait et il n’y pouvait plus rien…pour le moment.

Lentement alors qu’il la voyait disparaître dans ce voile brumeux il constata qu’elle était plus mystérieuse et charmante que jamais. Même si ce froid faisait ressortir sa part sombre il en émanait quelque chose d’humain, et s’il avait eut un doute à ce sujet les dernières paroles de la jeune femme vinrent lui confirmer ce qu’il pensait. Ces derniers mots prononcés étaient une mise en garde mais pour Kirito ils sonnaient plus comme un vœu. Il regarda la masse brumeuse devant lui et parla alors une toute dernière fois sachant qu’elle entendrait ses derniers mots avant de disparaître.

J’attends avec impatience le jour où nos route se recroiseront même si j’en appréhende les raisons. Prenez soin de vous mademoiselle Mayer.

La jeune femme ne répondit plus rien mais il sut qu’elle avait entendu. Lentement la brume se dissipa et il se retrouva seul sur le toit se tenant bien droit. Kirito leva les yeux et contempla les étoiles quelques instants. Il ferma ensuite les yeux et apprécia la légère brise du soir qui lui caressa le visage et ébouriffa ses cheveux. Alors qu’il avait cherché ici le repos il avait mis sa vie en jeu pour ses convictions et ses croyances. Il se sentait plus vivant que jamais ! Tout cela valait le coup il le savait, ou plutôt il l’espérait. Real ferait des victimes il en était certain mais s’il l’avait affronté il ne s’en serait peut être pas sorti vivant et c’était là une victoire bien plus importante. Son ennemie mortelle ne l’avait pas abattue, elle ne l’avait pas agressé et il sut que dans l’esprit de la jeune femme qui renfermait son humanité il était désormais présent.

Akihiko soupira puis baissa la tête et contempla au loin les dernières lueurs du jour disparaître. Il était temps de rentrer à l’auberge pour se reposer. Les expériences n’étaient pas terminées et il avait encore du pain sur la planche. Il marcha jusqu’au bord du toit songeant qu’il ne parlerait à personne de cette rencontre. Certains auraient vu en son comportement un acte de traîtrise ou de faiblesse mais lui savait que sa conduite était juste, peu lui importait l’avis des autres shinigamis. C’était désormais son secret, ou plutôt leur secret, à Real et à lui. Il jeta un dernier regard derrière lui là où quelques instants plus tôt la belle jeune femme se tenait. Un sourire se dessina sur les lèvres de quatrième siège.

Nous nous reverrons Real et je te sauverais. Je te le promets…

Kirito fit un pas en avant et disparut.