« Chair fraîche »

→ Du temps ou Naezka était encore un Adjuchas colossal, il lui arrivait parfois de quitter son territoire habituel pour s’enfoncer dans les profondeurs de Las Noches. La couche de Quartz n’était pas homogène : elle connaissait chacune de ses variations, de ses cavités. Le désert comme tout désert humain avait été forgé par le temps. Parfois la couche de Quartz se faisait plus solide et se muait presque en pierre, ou au contraire devenait fragile et friable. Lorsque c’était le cas, Naezka avait rapidement découvert que c’était principalement du fait des arbres de Quartz dont les branches se déployaient déjà souvent sous la surface : le sable se déposait alors sur celles-ci de manière irrégulière, et formait des poches creuses entre les ramifications qui fragilisaient le sol. Plus d’un s’était déjà fait prendre au piège. S’il lui arrivait d’hiberner quelques temps dans une caverne quelconque de ce type, il en existait au moins une parmi elle qui était immense.
Se déployant sur plusieurs kilomètres sous la surface, la Forêt des Gillians abritait sous ses cimes des centaines de Hollow mineurs se cachant des prédateurs qui peuplaient le Yermo. Malheureusement pour eux, c’est à l’époque ou la serpente était encore vorace qu’elle avait découvert leur repère : autant dire que certains en gardaient de très mauvais souvenirs.

Mais depuis qu’elle était devenue une Arrancar, l’appétit l’avait quitté, ou presque. Ses parties de chasses se faisaient rares, et ne servaient plus qu’à combler le temps où elle s’ennuyait VRAIMENT. Las Noches était vide, et en plus de manquer de distraction la répugnait depuis sa promotion. Tout lui faisait horreur : des murs blancs à ses habitants les plus sympathiques. Après tout Naezka n’avait pas réellement d’amis en son sein, et ce qui jusqu’ici avait été sa source de réconfort ne lui inspirait plus qu’une colère sourde et une réaction de rejet. Quand à la Quinta qui aurait certainement fait office de source de distraction intéressante, elle demeurait introuvable. La serpente s’en retrouvait donc réduite à parcourir le Yermo, une angoisse sourde au ventre. Le terme d’ « angoisse » n’était sans doute pas le plus approprié, mais correspondait bien à ce sentiment qui lui serait les entrailles et la laissait en proie à une espèce de pression constante. Afin d’y échapper, elle n’avait d’autre choix que de rester en mouvement constant et de se distraire de tout. Évidemment, cet état éprouvait quelques peu ses nerfs, et l’usait lentement mais surement.
Une vibration se fit sentir dans le sable autour d’elle avant qu’elle ne débouche sur une brèche qui venait de percer les dunes. Le visage pâle de la demoiselle déboucha à l’air libre, entouré d’une cascade de sable. Le sol avait cédé, et une partie des dunes avoisinantes s’engouffrait désormais dans la brèche béante pour s’échouer quelques dizaines de mètres plus bas, dans la forêt des Menos. Cela faisait longtemps que Naezka ne s’était plus intéressée à cet endroit, n’y trouvant pas grand intérêt… Elle ignorait d’ailleurs totalement les Hollows mineurs qui s’y trouvaient alors que ceux-ci comme elle se rapprochaient attirés par le remue-ménage inhabituel. Haussant les sourcils, la serpente porta son attention sur la source de ce glissement de terrain, distinguant deux silhouettes en contre bas. De toute évidence, l’une des deux personnes en présence n’était pas familière au monde blanc…
Déroulant lentement ses anneaux, l’Arrancar fit glisser une part de son corps autour du tronc de l’arbre le plus proche avant de se tendre jusqu’aux curieux individus en masquant quelque peu sa présence. Encore partiellement immergé dans le plafond, elle se tenait suspendue dans le vide sur plusieurs mètres, le corps raide. Délicatement, ses mains se posèrent sur les épaules de l’individu qui, au sein de se couple, attirait le plus son attention.

→ Et ben, qu’est ce qu’un joli brin de fille comme toi fait ici avec un Humain ? |

Un humain dont l’aura était nettement plus menaçant que celle de l’Arrancar sur laquelle elle avait les mains posées avec un sourire… Mais dont le sexe, malheureusement, ne trouvait pas grâce auprès de la Sexta, d’où son regard un peau hautain. Elle n’avait à vrai dire rien contre les humains, bien au contraire. Mais vis-à-vis de Nae, la période était mauvaise pour le « sexe fort ». Natrix et Naer à son cou dissimulaient ensemble le chiffre sur sa poitrine dénudée, comme ils en avaient pris l’habitude depuis qu’il y avait trouvé place.

« Chair fraîche »

→ Ooooh, tu veux pas partager. Presque dit à elle-même, à se demander si elle l’avait seulement pensé ou bel et bien formulé a voix haute. C’était pourtant un joli petit bout d’Arrancar, qu’il avait là sous la main. Pour quelqu’un de possessif, il n’avait pourtant pas l’air de se gêner. Ou peut être ne l’avait il pas fait exprès ? Va savoir… T’facon ces « mâles », ils n’avaient pas beaucoup de principe… Il pouvait très bien jouer l’amant courroucé parce que l’on touchait « sa chose » et aller voir ailleurs à coté, hein. Autant dire que dernièrement, le rapport de la serpente aux hommes n’allait pas s’améliorant.
En tout cas, la colère de l’inconnu fut de courte durée, et il eut tôt fait de la troquer pour une bonne dose d’humour graveleux. Un sourire étira les lèvres de l’Arrancar, alors que lentement mais surement son corps interminable se déroulait pour atteindre le sol et s’y poser en de longues courbes, la rapprochant à nouveau du petit couple.

→ Non, je ne vois pas du tout ce que tu veux dire ! … Ha bon ? Mais je doute qu’en matière de grand serpent blanc, qui-que-ce-soit soit de taille à rivaliser avec moi ~ |

Sa posture, élevant son buste plus de trois mètres au dessus du sol tendant à appuyer son propos. Pas assez bien pour elle ? Peut être bien. Après tout, qui pouvait mieux savoir contenter une demoiselle qu’une autre demoiselle, qui plus bien équipée… Quand à son petit mensonge, personne ne lui en tiendrais rigueur. Et puis, ces choses là étaient des affaires privées.

Mais soit, passant aux choses sérieuses. Enfin, aussi sérieuses qu’elle pouvait l’être avec ce genre d’individus… Parce qu’elle avait l’air de faire face à un sacré numéro, quand même. Qui n’avait pas froid aux yeux en tout cas, pour venir jusqu’ici dans les profondeurs du Hueco Mundo en trainant sa condition de mortel. Même bien accompagné… Rares étaient ceux qui osaient.
Mais il ne s’était pas attendu à entendre parler de Borick. Il laissait vraiment ses traces partout, celui la… (Quand a « Bourrique », c’était facile mais pas si mal. Elle aimait bien « gros mytho », aussi. ) Naezka laissât échapper un léger rire, qui ne laissait pas trop de place au doute. Evidemment qu’elle le connaissait… En même temps, il avait beau faire mine de « rester dans l’ombre », il s’arrangeait finalement pour que tous le connaissent, non ? Le petit vieux par contre, ca ne lui disait rien. Elle s’amusa simplement d’avoir brièvement pensé à Fou-lu, du fait de son « vieil âge » ; mais la « longue barbe blanche », c’est sur sa tête qu’elle se trouvait.

→ Hmmm… |

Elle n’avait aucune raison de lui indiquer Las Noches ou où se trouvait le chef de l’Exequias. Mais compte tenu du rôle de ce dernier, si le spécimen arrivait jusqu’au palais il serait sur de tomber dessus. Bien sur, Nae était la sexta Espada et ne pouvait pas se permettre de nuire a leur noble légion, mais du fait de son mépris actuel pour Las Noches… Elle était bien tentée de lui donner un tuyau ou deux.

→ Tu payes combien ? |

Tout en disant cela, elle gardait le regard rivé sur la jolie demoiselle aux coté de son interlocuteur, plus par taquinerie qu’autre chose cependant. Même si elle ne disait pas forcément non… A vrai dire, elle se doutait qu’il se détournerait aussitôt d’elle, préférant trouver Borick par ses propres moyens plutôt que de contracter une dette quelconque envers elle ou lui donner quoi que ce soit. Il n’avait pas l’air de ceux qui cèdent leurs affaires ou s’endettent volontiers… Si ce n’est pour de l’alcool et aux jeux ?

« Chair fraîche »

Nae haussa les épaules. Finalement, même ce genre de specimen au tempérament pourtant distrayant en apparence se montrait bien fade. Quand elle parlait de paiement, elle ne faisait que taquiner son vis-à-vis, dans une certaine mesure. Et faire preuve d’une certaine retenue… Mais qu’en avait-elle à faire ? Après tout Borick n’aurait pas fait cas pour elle. Bien sur si elle n’y gagnait rien il n’était pas spécialement dans son intérêt d’aider l’humain, mais rien ne l’en empêchait pour autant. Et puis, Borick était bien assez grand pour se débrouiller tout seul. Elle était certaine qu’il savait gérer les invités surprise avec brio.
Mais elle s’était bien sur attendue à une telle réponse. Ce qui était mois rigolo, c’était qu’ayant visiblement « perdu de son intérêt » à leurs yeux, ils ne voyaient pas d’utilité à s’attarder plus longtemps. Ses potentielles sources de distraction se détournaient d’elle aussi sec. Elle haussa le sourcil, se disant au passage que de la part d’un homme, qui plus est qui payait ou non d’après la tête du client, même en nature on ne pouvait pas vraiment parler de « paiement ». Pas comme s’il donnait beaucoup de sa personne… Enfin !

Ils se barraient, donc. Réagissant promptement, Nae s’élança soudain pour former avec son corps un large cercle au tour des deux « visiteurs ».

→ Si ca ne tenait qu’à moi… ! |

Malgré ce geste qui pouvait susciter la méfiance, son elle abordait un large sourire et ne dégageait aucune animosité particulière. Laissant sa phrase en suspend, l’interminable Echidna faisait quelques tours autour de la petite paire, non sans prendre le temps de les examiner un peu sous toutes les coutures… Quelle étrange brochette. Puis, soudainement, elle « sortit du cercle » qu’elle avait elle-même formé pour s’avancer dans une direction avec une conviction sans faille. S’arrêtât, et repartit aussi sec en sens inverse pour retourner dans leur dos.

→ J’irais par là, à votre place ~ |

Soit une direction qui ne correspondait guère à celle qu’ils étaient en train d’emprunter. Libre à eux de lui faire confiance ou non, après tout arrivé suffisamment près on voyait la forteresse d’assez loin, ne ? Reste qu’elle venait de leur indiquer la route la plus directe sans une once de remords (ni de prudence ?). Ca ne la regardait pas après tout. Désormais, elle s’inquiétait plutôt de ce qu’elle allait bien pouvoir faire de sa « nuit », vu que ces distractions n’étaient pas pour elle… Ce maudis Borick, il avait vraiment le cul bordé de nouilles. Tss. De la distraction venait même d'autres mondes spécialement pour lui.

→ Je suis sure qu’il saurât très bien vous recevoir. |

Se permit elle d’ajouter, avant de s’enrouler autour du tronc immense de l’arbre par lequel elle était descendue jusqu’à eux et gagner à nouveau le sable qu’elle n’avait quitté que peu de temps au par avant.