Seul, encore et toujours. Après ces années d’inconnu et de solitude, Uriô avait su se faire une nouvelle vie. Mais voilà, les choses ne pouvaient aller contre leur propre sens. Un homme pouvait-il vivre sans ses parents, ou au moins sans connaître la vérité sur eux ? Un Shinigami pouvait-il se juger humain malgré la possession d’un corps artificiel ? Non, il fallait que cette fausse vie s’arrête. Et pour cela, des réponses s’imposaient. Il devait savoir à propos de Ketsueki Hô, son père. Etait-il un criminel ou non ?

Mais pour avoir cette réponse, il fallait forcément passer par la Soul Society et le Seireitei. Comment y accéder ? Uriô n’avait entendu parler que du Dangai, auquel il ne pouvait avoir accès lui, simple ancien aspirant Shinigami. Dans ce cas, il fallait trouver quelqu’un pour lui ouvrir un passage. Mais là encore, les difficultés paraissaient insurmontables…

Trouver un Shinigami qui pourrait l’aider, un pari très risqué, mais pourtant c’était une des raisons qui poussaient le Ketsueki à ne sortir qu’en tant que Dieu de la Mort. Car même si dans cet état il voyait toujours les mêmes personnes, elles au contraire, ne pouvaient le voir. Seules les personnes à pouvoir spirituel le pourraient. Shinigami, Hollow, humains…

Mais aujourd’hui, il attendait. Paisiblement assis sur l’herbe, près de la rivière Onose. Son lit semblait si paisible, une rivière qui ne coulait que dans un sens, sans autre alternative. Et Uriô, en avait-il ? Pas vraisemblablement. Il lui fallait trouver un moyen… C’était primordial.

─ Père...

Car aucune réponse ne pouvait venir seule. Il devait lui-même aller la chercher.

D'un geste, Fou-Lu élimina son dernier adversaire avec sa lame d'énergie, laissant autour de lui un groupe de cadavres. Tous appartenant à des Shinigami. Cela faisait maintenant quelques temps qu'il se trouvait au sein du monde des humains. Et même un moment qu'il était en quelque sortes redevenu actif suite à sa longue convalescence. Si cela avait été calme ans un premier temps, il commençait déjà à réunir des serviteurs. De simple Hollows sans aucune envergure pour l'heure. De la simple chair à canon. Il était difficile de faire plus dans un monde où rares étaient les créatures s'élevant au dessus de la masse.
C'était d'ailleurs l'un des nombreux défaut de ce monde vis à vis de celui dont il s'était échappé à ses yeux. Le potentiel était moins élevé et il était bien conscient qu'il serait difficile de s'ériger une nouvelle cour ici. Peut être irait-il faire un tour au Hueco Mundo dès que possible, afin de chercher à palier ce problème.

Là, il était toujours dans cette ville où l'une des rares attractions s'offrant à lui était l'élimination d'un groupe de Shinigami. Exactement comme ce qu'il venait de faire. Ces fous l'avaient attaqués à vu, peur être inconscients de ce à quoi ils faisaient face. Non pas sa nature, mais l'importance de son évolution. Aussi nombreux soient-ils, des insectes ne pouvaient éliminer un Vasto Lorde. Les choses étaient aussi simples que ça.
Son arme d'énergie fut dissipée tandis que son fidèle compagnon macabre s'approcha des corps. Sans un mot, Fou-Lu le repoussa du pied, lui faisant comprendre que l'heure n'était pas au repas. Le chien monstrueux l'observa un instant, comme s'il ne saisissait pas. En effet, l'Empereur avait maintenant l'habitude de le laisser faire lorsqu'une telle occasion se présentait. Ce qui le força donc à prendre la parole afin de lui faire comprendre.

>> Le nettoyage n'est pas encore terminé.

Quǎn n'avait pas chercher à repérer d'autres ennemis, son maître l'avait fait naturellement. Un autre Shinigami se trouvait non loin. A l'écart du groupe, avec une puissance semblant un minimum plus élevée que celles des incapables gisant à ses pieds. Il était possible qu'ils soient liées, ce fait pouvant posséder plus d'une explication. Tout comme il était possible qu'ils n'aient tout simplement aucun rapport que ce mystérieux Dieu de la Mort se soit trouvé au mauvais endroit, au mauvais moment.

Une chose était certaine, l'être millénaire n'allait pas se contenter de l'ignorer. Il y avait trop de risque à cela. Ainsi, il s'approcha, masquant sa présence. Puis il le vit, assit face à la rivière. Sourire de la part du chinois. Il n'avait pas été repérer. Il pu même entendre un mot prononcé par l'être à la tenue sombre. Il se décida alors d'entrer en jeu.
D'un Sonido, il vint se placer dans le dos de l'individu, révélant au passage toute l'ampleur de son Reiatsu. Il n'était pas question de faire dans la discrétion, ce n'était pas en accord avec son style. Le sien était plutôt d'écraser par sa présence. A ce moment, il se pencha donc légèrement sur celui ayant éveillé l'attention de l'Arrancar.

>> Pauvre petit Shinigami. Tout seul. Isolé des siens. A la merci du méchant monstre. Après son père, va-t-il appeler sa mère ?
Inutile. Il est déjà à la merci de Dieu.

La peine et l’incertitude avaient donc laissé place à un objectif bien précis : réussir à s’infiltrer ou tout simplement à se rendre au sein de la Soul Society. Mais comment faire, la était toute la question. Et Uriô se devait d’y répondre. Soudain, un déferlement de puissance se sentit. Derrière, à quelques centimètres ! Mais ce qui fut encore plus soudain et surprenant, ce fut la réaction d’Uriô. Alors qu’il avait désiré de toutes ses forces bondir en avant pour éviter une quelconque attaque, il était resté immobile. Tant de sentiments et d’impressions qui se passèrent en l’espace de deux secondes.

Et puis le calme. Le Ketsueki n’avait pas bougé. Il s’était même dit que mourir ici pouvait être une option qui, peut-être, était la meilleure. Après tout, il n’y aurait plus de questions, plus d’éventuelles déceptions… Il était seul, après tout.

─ C’est inutile. Elle non plus ne viendra pas.

Et le Shinigami ne s’était toujours pas retourné. Il se savait en danger, il se savait menacé. Mais il semblait vouloir rester là où il était, dans une position plus que délicate, dans laquelle il ne pourrait à moins d’un miracle échapper à une quelconque attaque. Toujours l’air lassé, sans pour autant paraître ridicule, il détourna enfin son visage de la rivière. Sa tête avait alors découvert son interlocuteur. Un Arrancar.

Voilà qui promettait une issue encore plus incertaine que contre les humains comme Real Mayer ou Koshiro. Un être directement opposé à la race dont l’ancien aspirant faisait partie. Encore quelqu’un rempli de haine envers les Dieux de la Mort.

─ Tu n’es pas Dieu. Il n’existe pas.

Il esquissa un sourire, avant de détourner son regard de celui de l’Arrancar. Une nouvelle fois, les pupilles du Dieu de la Mort se tournèrent vers le bleu azuré de la rivière. Puis d’une voix toujours aussi monotone et neutre…

─ Mais libre à toi de m’infliger ta sentence.

La sentence pour un Dieu, déchu de ses deux ailes. N’y avait-il donc pour lui que la Mort ?

Pas de réelle réaction. Le Shinigami restait tranquillement installé alors qu'un être aussi puissant que l'Empereur se tenait derrière. Peut être avait-il un excès de confiance en lui. Il s'agissait de la solution la plus logique aux yeux de l'Arrancar. Une pauvre âme certaine qu'elle n'avait rien à craindre car capable de gérer n'importe quelle menace, si bien qu'il n'avait pas à se lever. Pire encore, à part pendant un bref instant, n'avait même pas besoin de véritablement le regarder et l'incitait même à appliquer sa sentence.
En fait, cela suffit pour commencer à provoquer un énervement chez Fou-Lu. Il détestait être ignoré. Sa mentalité même était contraire à un tel état d'esprit et il considérait ça comme un crime nécessitant une punition certaine. Qui était-il, simple Shinigami, pour oser agir de la sorte ?

>> Un Dieu de la Mort ne croyant pas en l'existence de Dieu ? N'y aurait-il pas une contradiction certaine ?

Il y aurait certes grandement à débattre à ce sujet. Il s'agissait certes d'une appellation, mais il était évident que les Shinigami n'étaient pas des Dieux. De simples âmes aux capacités particulières. Comme ce qu'il était. Dans l'absolu, aucun des deux protagonistes n'était des Dieux simplement par la nature de leur race. Dans les faits.... Il était évident que lui, être ayant surpassé la mort et échappé au danger qu'elle représentait s'était placé au dessus de la masse que représentait le monde de l'esprit. Il était l'Empereur, il était le Dieu. Beaucoup le nieraient, mais leur avis n'avait pas de valeur à ses yeux.

Lentement, Fou-Lu recula de deux pas. Il ne fuyait pas, une telle attitude étant indigne de son statut. Il prenait simplement un peu d'espace afin d'être plus libre dans ses mouvements. Il s'était rapproché pour la mise en scène, pour ce qui allait suivre cela ne serait nullement nécessaire. Pire encore, cela pourrait être un handicap.
Son bras gauche s'écarta légèrement de son corps et, à l'intérieur de cette main prit place une lame constituée de Reiryoku pur. C'était sa façon personnelle d'utiliser sa grande maîtrise de l'art de l'épée sans pour autant faire l'honneur à ceux ne le méritant pas de leur montrer son Zanpakutô, sa véritable arme.

>> Mais puisque tu le demandes, je vais appliquer ma sentence. Et c'est évidemment la mort.

L'instant d'après, il se mit en mouvement. Les coups ne pouvaient être comptés, la vitesse de l'Empereur étant bien trop importante. De lui, seules des images au moment de porter le coup pouvaient être saisies par l'oeil. Il était obligé de ralentir ne serait ce qu'un peu pour se faire, mais c'était pour mieux accélérer juste après.
Son but était véritablement de tuer sa cible, celle-ci l'ayant ouvertement demandé. Quelle ironie cela serait-ce qu'un Dieu de la Mort connaisse la mort contre un Dieu.

Il fixait la rivière. Elle coulait tranquillement, sans que rien ne puisse changer ça. Etait-ce l’image, le reflet de la destinée ? Le destin, un mot bien souvent religieux, et pour autant toujours utilisé malgré sa complexité. Est-ce que le destin existait vraiment ? Car il était toujours facile pour lui de dire « je t’avais prévenu » lorsque les choses s’était enfin produites. Mais jamais il ne prévenait. Fallait-il en conclure que rien n’était décidé à l’avance ? Et pour Uriô, quel futur avait-il ?

La colère semblait avoir gagné l’individu qui se tenait derrière le Shinigami. Un Arrancar, en y repensant, était loin d’avoir été la personne que le Ketsueki aurait souhaité voir en cette journée de réflexion et de repos. Quoi qu’il allait peut-être l’aider à avoir le repos éternel… Sûrement. Car l’homme aux cheveux blancs était resté immobile, comme depuis le début. Ses pupilles reflétaient le bleu de l’eau. Et même s’il sentit le coup venir, il ne put rien faire. Il n’aurait pas pu esquiver, de toute façon, même s’il l’avait voulu.

Pour autant, une force surnaturelle sembla le pousser dans une autre direction que la mort, ou du moins l’abandon de sa vie. Il se retourna, mais se vit le bras gauche touché. Et cela continua pendant plusieurs secondes. Des secondes qui parurent durer de longues minutes de douleur pour le Dieu de la Mort. Cette main invisible qui l’avait poussé à se protéger avec ses bras n’avait que retardé sa mort.

L’assaut s’arrêta, et il tomba. Le sang tachait de nombreux endroits de sa tunique noire. Bras, jambes et ventre s’étaient vu nids de coupures plus ou moins importantes. Il ne sut pas s’il voulut parler, mais Uriô avait bien compris qu’il ne le pouvait pas, de toute manière. Son regard quitta peu à peu celui de l’Arrancar, avant de disparaître. Il ferma les yeux, essayant d’oublier la douleur. Essayant de se rappeler la rivière.

Allait-il réellement mourir, sans réponse à se donner ?