OST : Forever alone in the Yermo

Immobile au milieu des dunes de sable, un petit garçon laissait son regard dériver au loin, se perdre dans les ténèbres que seule la pâle lueur lunaire parvenait à disperser. Un faible vent venait caresser sa peau blafarde, tandis qu'il ne bougeait pas, semblant méditer. Seul. Voilà ce qu'il était.

Cette vie le lassait. La patience était une vertu qui allait de paire avec l'immortalité, mais elle n'était pas infinie. Rien n'échappait longtemps aux affres du temps, ou de l'ennui. Et Salvador ne faisait pas exception à la règle. Là, planté au-milieu du Yermo, il n'était plus qu'un piètre épouvantail, juste bon à effrayer quelques Adjuchas déboussolés. Les humains, qu'il méprisait tant maintenant, du haut de sa condition d'immortel quasi-omnipotent, lui semblaient bien chanceux ; leur vie était courte, mais pas ennuyante.

Les humains avaient la même faculté que les étoiles filantes, qui se laissaient entrevoir quelquefois dans la mer d'obsidienne qui surplombait le Yermo : éphémères, certains d'entre-eux parvenaient à marquer durablement les esprits avant de s'éteindre, de se perdre au-delà de ces ténèbres qui lui resteraient -Salvador l'espérait- à jamais inaccessible.

Salvador ne voulait pas s'éteindre, ni marquer durablement les esprits dans un dernier éclair de lumière. Il voulait briller, inlassablement, comme ce soleil qu'il n'avait plus revu depuis maintenant bien un millénaire. Reverrait-il un jour le char d'Hélios ? Avait-il envie de le revoir ? Depuis quelques temps, l'être à l'aspect juvénile se posait de nombreuses questions dont il n'avait pas la réponse. Cela avait commencé après ses multiples rencontres avec des membres de l'Espada.

Le Hueco Mundo était fade. Ce n'était qu'un infâme bouillon de consciences supposément supérieures, qui ne faisaient que s'affronter dans le seul but de satisfaire leur orgueil. Salvador était également de cette espèce, il n'aspirait qu'à devenir le Seul, l'Unique, l'Alpha et l'Oméga, la Fin et le Commencement et bien d'autres noms pompeux, précédés d'une majuscule. Mais il devenait de plus en plus las. Il n'y avait rien à gagner dans le Hueco Mundo.

Il était creux, comme son nom le suggérait. Une pierre précieuse qui avait déjà donné toutes ses ressources, ne laissant plus, à récolter, que l'amertume du sang et le sel des larmes. Comme un vieux colon en Amérique, Salvador devait quitter le Hueco Mundo pour une terre plus riche, plus fructueuse. Une terre que l'on s'imaginait refuser à lui et ses semblables.

- Un jour... commença-t-il, rompant le silence de sa voix frêle et pensive. Un jour, je quitterais ce désert. Et je ne connaîtrais plus jamais cette lassitude.

Mais ce n'était que des mots, des sons qui se perdirent dans l'immensité du désert, vite emportés par le vent. Pourtant, Salvador ne les avait pas proféré en vain. Car les mots s'étaient également logés dans ce qu'il lui restait de son âme, telle une promesse.

Promesse qu'il honorerait un jour..