- On y est.

Le chauffeur de taxi avait dit ça sur une voix morne. Je m'étais contentée de redresser la tête, absorbée que j'étais par ma console portable 3DS. J'étais enfin arrivée. Il avait fallu presque une heure pour atteindre l'adresse. Même si j'étais en classe d'affaire, le voyage en avion, bien que court, m'avait laissée toute cassée. Et je n'avais pas pris de repos ni rien. Je m'étais contentée d'aller droit au but : A l'adresse que l'on m'avait donnée. J'étais finalement contente de m'extirper de ce siège, si bien que je me contentais de payer la course en chuchotant un vague :

- Tchié tchié.

Je connaissais le mot japonais pour remercier, mais j'avais fait genre que je ne comprenais pas le japonais. Que j'étais une touriste quelconque qui ne voulait pas s'embarrasser d'une langue aussi primaire que celle-ci. La vérité est que je maîtrisais correctement l'idiome, et que je souhaitais juste être tranquille, n'ayant nulle envie ni besoin d'entretenir une conversation avec un quelconque chauffeur de taxis. J'étais venue peu chargée, un étui à violoncelle et un gros bagage à roulettes. Je ne jouais d'aucun instrument, si vous vous posiez la question. Mais il fallait bien un étui de taille suffisante pour abriter le Cheng Fa. Bien que fille de diplomate chinois, une n'était jamais à l'abri d'une fouille, et un fusil quelconque attirerait bien plus de questions que je ne pouvais me le permettre.

J'étais devant une immense tour en plein centre ville. A coté du quartier des affaires. C'était mon appartement. D'un prix prohibitif, comme vous vous en doutiez. A tel point que j'avais accepté de le prendre en collocation avec une inconnue, qui miraculeusement le louer. La chose m'avait parue ... Suspicieuse. Mais l'endroit étant ce qu'il est, et moi l'adorant avant même de le voir, j'avais su faire une concession. Je n'aimais pas les gens, et j'aimais encore moins les inconnus. Mais je pourrai faire une exception avec elle. Tant qu'elle respecterait mon espace privé. Mes étages dans le frigo'. Et que je regarde mon émission chinoise préférée à 21h. Sinan, définitivement. Ça ne se passerait pas très bien.

J'avais pris l'ascenseur. Ca avait sonné le onzième étage. Mon appartement ? Le numéro 221. Je parcourais le couloir avant de trouver le numéro. Appréhension qui me tient. Je n'ai jamais été douée avec tout ce qui concernait le lien social.

D'un autre coté, personne n'était assez génial pour qu'il mérite que je m'intéresse à lui.

Avec un sourire satisfait, voilà que je tournais les clés dans la porte, et que je la poussais.

- Ni hao.

Advienne que pourra.

Parfois le monde se profilait bizarrement et c’était ce que ce nouveau tracé de vie rappelait en leçon à la fille aux cheveux bleus qui le parcourait. Pour seuls bagages un sac qu’on lui avait confié ou masse de billets étaient liés dedans, un contrat « ils » appelaient ça, comment était-elle arrivée là ? Longue histoire, quand on pensait qu’il n’y avait pas encore quatre mois, la fille vivait dans un temple hors du temps, hors du monde… Et maintenant ?

Travailler pour vivre toujours certes, mais plus aussi simplement qu’avant, il n’était pas question de nettoyer en véritable esclave, l’effort était parfois plus rude et plus sale encore. Long soupire, la fille tentait de ne plus penser à ça, après tout, elle était « rentrée », dans cet endroit à quatre pièces, à droite son sanctuaire, le nouveau, on appelait ça une chambre, à gauche celui de celui ou celle avec qui elle devrait cohabiter… Pourquoi diable vivre avec quelqu’un ? C’était une mauvaise idée, cependant, Miaru n’avait jamais été seule… Pas une seule fois et le loyer ici était incroyablement cher… Mon Dieu, les hommes étaient de plus en plus fous à chaque génération.

L’ancienne shinigami soupirait à nouveau en allumant la lumière, les volets de la pièce principale étant fermés, il faisait sombre, mais elle distinguait coin cuisine, table et porte menant aux commodités. Pas le grand luxe, mais pourtant, bien plus dans le genre qu’elle n’avait jamais connu, sa première action fut de dégager la vue, pas terrible certes, mais si haut perché, elle se sentait un poids envahie du poids de ce corps terrestre. Le vent s’engouffrait à l’intérieur et le courant se fit plus dense face à l’appel que créait la porte d’entrée qui s’était ouverte. Un regard en arrière et une inconnue à l’air aussi septique qu’elle, la première arrivée pivota légèrement pour s’asseoir sur la rambarde de la fenêtre, là elle y croisa les bras et les jambes, examinant ce qui se profilait devant elle.

-Je prends celle-là.

Renseignait-elle en désignant son territoire franchement acquis. Nouveau vent balayant sa tignasse couvrant en partie son sourire en coin, pas vraiment le sien en fait, plutôt celui de son ombre qui trouver la charmante colocataire à son goût, m’enfin, ça n’avait pas grande différence… Depuis quelques temps maintenant l’ombre et la lumière avait du mal à garder leur différence tranchante.

-Tu es bien mignonne ma jolie ! Un plaisir que de venir te border quand tu ne trouveras pas le sommeil le soir.

Regard perçant qui s’adoucissait au bout d’un moment, la gamine shinigami était en train de céder ? Pas vraiment, mais il fallait savoir reculer parfois pour mieux avancer, perdre pour mieux gagner… Son fascié se faisait plus « naturel », quand elle se présenta à son tour.

-Miaru pour ma part. Je suis ne cuisine pas et j’ai horreur d’être réveillée, ne t’avise pas de toucher à mes affaires non plus, ni d’entrer dans ma chambre et ça devrait le faire.

Elle lui tendait la main en ajoutant ceci…

-Bienvenue chez nous !

Je sais pas pourquoi. Mais instinctivement, j'ai décidé que ma colloc', je l'aimerai pas. Chevelure courte bleutée, petite, mince, des attributs féminins plus remarquables que les miens ? Ça attisait mon animosité. Me rendait jalouse. Alors quand elle commence à faire genre que c'est elle la maîtresse de la maison, direct, je tique. J'affiche une mine qui veut dire clairement : Nan mais t'es sérieuse ? Rien que pour ça, je décide de faire glisser mon casque neko-mini sur mes épaules, pour ne pas rater une goutte de ce qu'elle avait à dire. Même si ça me déplaisait de l'avouer, le japonais ne m'était pas assez familier, et je risquais de rater quelque chose si je ne me concentrais pas.

Voilà qu'elle choppe la chambre, la plus grande je suppose. Si elle ne l'avait pas été, pourquoi elle l'aurait choisie, commence à me dire des trucs de déviante, puis limite me fait le même pitch que celui que je m'étais fait mentalement avant d'arriver sur place. Sauf qu'elle, elle l'a dit. Avant moi. Et ça me plait pas. Mon regard s'attarde sur la racine de ses cheveux, pour voir si c'est une teinture. Visiblement pas, ou alors, c'est bien caché. Excentriques japonais ... Je me mords la lèvre. Elle me dit la bienvenue, m'ouais. Je m'exprime alors dans un japonais approximatif, avec un accent chinois extrêmement marqué.

- Non.

Pour donner le ton à la conversation.

- Moi vouloir chambre toi montrer.

Je n'avais pas vue l'autre, et je m'en moquais bien. Même si elle aurait pu être mieux, ce qu'elle ne pouvait être anyway, je faisais ça par principe.

- Pas avoir problème, espère ?

Je laissais mon bagage au sol, avant de me pointer bieeeen devant l'azurée. Mon visage à peine à quelques centimètres du sien, mes traits métisses contre ses traits nippons.

- Pas avoir inquiétude, meinv. Toi pouvoir venir quand toi vouloir dire coucou. Pas avoir inquiètude. Fei pas mordre. Même si Miaru appétissante. Kekekeke.

Je gloussais, me séparant d'elle, jetant un coup d'oeil à l'appartement, finalement.

- Moi penser Fei et Miaru avoir location sereine. Pas penser même ?

Je battais des cils, l'innocence même.

Ah ouais, elle direct, elle arrivait et chercher la confrontation, première arrivée, première servie, c’était ballot, mais la triste réalité de la vie, l’azur du regard de la bleue se perdait dans celui de sa « camarade », un air de défi qui planait par ici…

-Non, c’est ma chambre, pas négociable, fallait arriver avant.

Elle pouvait feinter de ne pas comprendre, rien à cirer ! La shinigami était bornée dans son genre, d’autant qu’elle ne l’avait même pas visité cette pièce… Mais peu importe, pas question de se laisser marcher sur les pieds dès les premières secondes ! Elle l’avait dit la première, point final. Un sourcil s’arquait tandis que l’autre faisait la mignonne, si le numéro de charme prenait à un niveau, celui du Holow… de l’autre… Appétissante hein ? Pas la première fois qu’on lui disait ça… Mais pas la question. Mais alors qu’elle se perdait dans sa réflexion, un autre n’avait pas perdu son temps pour relancer la charge…

-Moi en revanche je mord, tu peux quand même venir faire coucou…

Ricanement et regard plus sombre rapidement dominé à nouveau par la maîtresse originel de ce corps, franchement, vivre avec quelqu’un… Comme elle en plus… Allait être compliqué. Elle concluait par la même occasion que la fille s’appelait Fei ? Et vu son accent elle n’était pas d’ici, ça tombait bien, elle serait ainsi deux étrangères. A nouveau perdu dans ses pensées, une faille vite utilisée…

- Mais si tu veux tellement cette chambre on la partage.

Sourire de carnassier, après tout, juste avant on parlait de border, la fille secouait alors légèrement la tête comme pour soumettre l’idée à son ombre de se taire, en vain bien sûr. Peu importe, tandis que l’enquiquineuse admirait la zone, la fourbe de Miaru remettait la main sur ses affaires à elle, puis soudainement, elle lorgnait malsainement sur le bagage de sa rivale… Un courant d’air l’appelait aux vices et un rictus se formait à nouveau, sans change comme ferait la belle enfant ? Impulsion et le sac traversait le puit de lumière tandis que la colocataire avait détourné son attention. Son tour à elle de glousser en se dirigeant vers la fameuse chambre. La sienne ! Et tout en tournant la poignée, elle glissait un mot sa tête posée sur sa propre épaule pour augmenter la nature troll de l’action…

-Tu n’as pas de bagages à ranger ?

Sa langue s’étirait un instant et c’était d’un air satisfait qu’elle découlait vers… Un placard. En ouvrant la porte… Wtf ? Un balais frappait même le haut de son crâne en bonus pour la ramener à la réalité, non elle ne rêvait pas, mais il n’y avait que 4 portes ici, une ouverte montrant la salle d’eau, celle de l’entrée, celle-ci et l’autre…

-C’est une blague ?

Je savais qu'elle n'allait pas accepter sagement de se faire prendre la chambre. Mais j'aime bien la confrontation. C'est dans la confrontation qu'on s'exalte. Qu'on grandit. Et qu'on se dépasse. Pas négociable qu'elle dit. C'est sa chambre qu'elle dit. Attend une minute ... Ah. Oui. C'est mort. Je m'étais retournée lentement, posant sur la bleutée un regard doucereux alors que j'articulais lentement.

- Pas entendre. Quoi Miaru dire ?

Je lui adressais un petit rictus, alors qu'elle passait à autre chose.

- Toi venir mordre, venir, venir. Fei accueillir comme devoir.

Mon sourire s'était élargi, révélant ma dentition parfaite. Tu voulais jouer à ce petit jeu ? Soit. Mais je pense que tu craqueras avant moi. Je peux aller VRAIMENT loin. Quand je veux quelque chose. Alors quand elle me propose de partager la chose, je glousse et réplique un peu dédaigneuse.

- Pas besoin. Moi prendre chambre. Toi prendre chambre.

Je n'avais pas précisé de quelle chambre je parlais, la confusion étant complète. Mais voilà qu'au moment où je me retournais ... Je voyais une valise volé vers la fenêtre. Mes yeux se sont écarquillés. Et j'ai arrêté de respirer. Pendant quelques secondes.

- SALOPE QUOI TOI FAIRE ?! CHIENNE NIPPONE !

Elle s'était détournée de moi, grave erreur. Alors qu'elle ouvrait la porte du placard et qu'elle était assommée un instant par un balais lui tombant sur le front, je l'avais poussée violemment à l'intérieur de l'espace confiné, et tout aussi violemment, avais refermé la porte derrière elle. Comme ça. Et pour être sûre que cette sale CONNE n'en ressortirait pas, j'avais bloqué la porte avec le balais.

- TOI PENSER MALINE ? TOI PAS CONNAITRE FEI, FEI PAS ETRE FILLE PLAISANTER !

Et là ? Balayage furieux de l'appart', jusqu'à voir les affaires de ma colloc' ...

Elle était… Enfermée dans un placard. Franchement, à la base, elle devait juste partager un appartement ! Qui aurait que ça finirait en… En quoi d’ailleurs, dans l’espace sombre, la fille aux cheveux attrapait une ficelle et tirait dessus, voilà un peu de lumière. Elle grogna légèrement en lâchant son sac, ah ouais, elle veut jouer à ça la morveuse ! Miaru avait déjà tant d’années, qu’elle était incapable de les donner, mais la voilà si ridiculement piégée, tandis que des bruits de remous ménage se faisait entendre. Oh bordel, c’était qu’en plus elle en foutait du bordel justement ! Elle allait lui arracher la tignasse, c’était décidé… Enfantillage ou pas !

-Bon, je ne vois qu’une façon de régler ça !

Grand coup de tatane dans la porte, qui rapidement se faisait défoncer, laissant apparaitre une bleue furax qui allait ranger ça ? Certainement pas elle, non Miaru préférait remettre en place les neurones de sa colocataire en agrippant sa tignasse tellement…

-Soyeuse ~ T’ite chaton !

A la base, elle voulait juste lui dire de se calmer, mais elle n’avait pas rêvé, elle l’avait traité de ? Bon ok, pour le coup elle en avait été, enfin pas elle lui, le même sombre personnage qui fit pointer un doigt vers le bagage de la bleue… Traître. Même pas en rêve, la Shinigami tentait de saisir la furieuse, vivre avec ça c’était possible ?
Difficile à concevoir en voyant une pluie de billet se libérer du sac balancer de la protagoniste de la catastrophe. Miaru se stoppait sans voix… Merde, ses biftons quoi ! Enfin même pas les siens, cette fois, le crêpé de chignon était inévitable, un méli-mélo de demoiselle pas si en détresse que ça qui en se poussant faisaient céder une porte menant à la chambre, base de l’histoire justement… La bleue levait le nez et découvrait une pièce presque aussi ridicule que la première… Une évidence…

-On s’est fait rouler…

Et comme des bleues qui plus est ! Ce type qui lui avait filé ce « bon tuyau » il ne payait rien pour attendre ! Ah ça non ! D’ailleurs, elle agrippait toujours fermement la chatone en rejoignant la sortie, le plan ? Chopper le concierge et le faire parler, accessoirement le faire souffrir pour ça…

- Ecoute-moi bien, pas question de laisser passer ça ! Quitte à faire un trou dans le mur de l’appart voisin ! En se recoifferait plus tard...

Quel merdier !

La salope azurée était enfermée dans le placard. Moi, je venais de mettre la main sur ses bagages, une moue sinistre sur les lèvres. Maintenant ? Réserver un sort terrible à ses pauvres fringues, oh oui ... Elle avait jeté les miennes par la fenêtre ? Moi je ferai preuve de plus d'imagination ! Si bien que je me dirigeais vers la cuisine. Dans les placards, 'doit bien y avoir des produits destructeurs pour des quelconques tissus. Je me délectais de cette idée, alors que je faisais un premier pas en leur direction. Oh oui. Je ne faisais pas ça par plaisir. Je le faisais par devoir. Pour que cette petite conne sache qu'on ne joue PAS avec moi. Et ça me faisait assez délirer, en fait.

Crac. Bruit d'une porte qu'on nous défonce. What ? Je me retourne pour voir une salope me foncer dessus. Pas le temps de réagir, je suis éberluée par la chose. Putain sérieux là ?! On est pas dans un random film d'action ! Les portes ça se cassent pas, surtout quand on a un physique comme le notre bowdel ! Le bois doit être pourri, noway ! C'est la seule explication possible et imaginable, alors qu'elle m'agrippe par la tignasse. Je gueule, de surprise et d'un peu de douleur. Je me débats.

- SALOPE TOI LACHER FEI TOUT DE SUITE !

Elle me parle de chaton et de soyeux, j'en ai rien à foutre, dans un élan de génie, je décide de me débarasser du bagage. Devant son regard halluciné et le mien étonné, des billets s'envolent alors que le bagage disparait dans un torrent de lumière. Et intrinsèquement, débute une folle épopée vers le sol, là où il sera dépouillé eu égard à son contenu.

- Oups ?

C'était par politesse, je n'étais pas désolée. Merde quoi ! C'était elle qui avait déconné, c'était elle qui avait commencé toute cette histoire ! Pas ma faute ! Je me suis juste vengée, et puis merde ! 'faut être totalement stupide pour planquer autant d'argent dans un sac ! Et même ! Genre même ! D'où elle le sort cet argent ?! Si ça se trouve on m'a maquée avec une trafiquante de drogue ou pire encore, c'quoi l'embrouille !

Pas le temps d'y penser, voilà qu'elle s'enrage et qu'on tombe au sol. On roule, elle me frappe, je la frappe, je lui tire les cheveux, elle fait de même, on poussa des grognements alors que finalement on est arrêtés par une porte, un mur. Porte qui s'ouvre. Ma colloc' remarque que c'est un autre placard. Minute, what ? Un ... PLACARD ?! Et NOS CHAMBRES ALORS ELLE SONT PUTAIN DE OU ? Pas le temps de poser la question que je suis trainée bien malgré moi vers l'entrée. Elle me dit qu'il fallait règler ça avec qui de droit.

- Toi lâcher, démon bleu ! Fei faire ce que Fei vouloir. Toi avoir chance Fei vouloir être Miaru vouloir. Alors lâcher, ou Fei être pas contente.

Je montrais les dents, alors que d'une tape sur sa main, je me défaisais de son étreinte. Passant ma main dans mes cheveux pour les lisser, je prenais les devants. Qu'elle le veuille, ou non. Et ça incluait de rentrer dans l'ascenseur, et de la pousser alors qu'il se refermait. Profite bien des onze étages que tu dois descendre, petite poupée ! Nya nya nya.