Quand Numeròs rencontre Espada [pv Tibors Tiesce]

Jack est un Arrancar relativement solitaire, il vaque à ses occupations qui se résument généralement à tenter de nouveaux pièges et de nouvelles combinaisons de techniques dans le Désert Blanc sur des pauvres Adjuchas, les seuls capables de résister "un peu", les Hollow et autres Menos ne tiennent pas suffisamment longtemps. Or, pour tester de nouvelles expériences il faut des compagnons de jeu, les malchanceux qui tombaient sur Jack n'avaient aucune chance de s'en tirer. Si bien que les alentours de Las Noches qui étaient normalement peuplés d'Adjuchas, fut rapidement déserté. A lui tout seul, cet énergumène avait réussi à faire évoluer la faune de la zone sur près de cinq kilomètres. Jack étant quelqu'un de naturellement flemmard, il devait donc s'éloigner du palais pour tester ses compétences, cela l'énervait et l'inspirait à trouver de nouvelles combinaisons et techniques encore plus traitres et fourbes.

Mais parfois ça le lassait alors il retournait faire un tour dans le palais voir si de nouvelles têtes apparaissaient ou pour écouter aux portes. Il se murmurait d'ailleurs qu'un nouveau Cuarta Espada était arrivé en ces murs, il entendu dire que c'était un vantard assumé et exacerbé, m'enfin, tous les Espada l'étaient plus ou moins. Jack se mit à rire dans sa barbe en s'imaginant le nouveau venu en train de parler avec Borick, le Numeròs qui ne mâchait pas ses mots se dit alors "comme disent les humains, ils discuteraient nuit et jour pendant un millénaire avant de décider lequel des deux à la plus longue". Tout ça l'intéressait guère, il n'était pas du genre vantard, plus flemmard que vantard à vrai dire, il faisait son ptit bonhomme de chemin tout seul et ça lui convenait très bien ainsi. Se faire aboyer des ordres par un Espada ne lui aurait vraiment pas convenu, surtout cette Quinta... à chaque fois qu'il entendait sa voix, Jack sortait du palais utilisant son Sonido du plus haut niveau pour aller chasser, même quand il n'en avait pas envie. Il la fuyait comme la peste, c'était son opposée totale. Elle passait son temps à hurler sur les uns et les autres, mais dans le fond, tant qu'il l'évitait il avait tout à y gagner à ce qu'elle soit ainsi. Avec un peu de chance elle se ferait éliminer rapidement et il aurait une chance de prendre sa place. C'est ainsi que Jack réfléchissait. Il n'avait pas l'ambition particulière de devenir Espada mais l'idée d'être considéré et d'avoir des serviteurs lui convenait bien, il aurait encore moins à en faire que ce qu'il n'en fait déjà. Autant dire qu'il passerait la plupart de ses journées à dormir ou à tester ses capacités sur ses serviteurs.

Enfin bref, totalement perdu qu'il était dans ses pensées, il finit par entendre une voix qu'il ne connaissait pas du tout et qui le sortit de sa bulle, c'était sans doute ce nouveau dont il avait entendu parler. Lui-même n'était pas bien vieux en tant qu'Arrancar donc il se sentit quelque part lié à ce gars là. Il se dit qu'en d'autres circonstances, ils auraient pu tomber l'un sur l'autre dans le Désert Blanc pendant leur ascension aux différentes étapes de la vie d'Arrancar et cela aurait sans doute fini par la mort d'un des deux, à en juger par sa force, Jack n'aurait pas été sur d'en sortir victorieux, piège ou pas piège, fourberie ou non et il n'en serait pas là aujourd'hui. Il se mit alors une grande claque en travers de la tête "Qu'est-ce qui me prend d'être nostalgique comme ça moi? murmura-t-il à lui-même. Cela lui remit les idées en place et il s'en alla donc rencontrer Tibors.

- Salut ! Alors c'est toi le nouvel Espada? Moi c'est Jack, ravi de faire ta connaissance.

Dit-il en enlevant son chapeau, sourire aux lèvres et en recrachant la fumée de sa cigarette.

« … et vous prendrez bien garde à ce qu’ils ne se mangent pas entre eux. Ces Hollows sont franchement plus demeurés que la normale, cela m’intrigue beaucoup. Mais dois-je me priver d’une ressource sous prétexte qu’ils sont un peu déficients intellectuellement ?
Je vous réponds : certainement pas. »

L’Arrancar face à moi me dévisageait avec un je ne savais trop quoi d’ébahi du fond des yeux. À l’image des Hollows que je venais de ramener à Las Noches, lui aussi semblait souffrir d’un retard mental. L’Arrancarisation n’était pas un phénomène heureux pour tous visiblement, elle rendait les traits plus expressifs à la niaiserie bien plus que les masques blancs.

« Hého, allô, allô ? Est-ce que vous m’entendez ?, je tapotai la joue du garçon pour attirer son attention. Par un merveilleux miracle, il parut se ressaisir et je pus lire dans son regard une minuscule étincelle de compréhension. Ah, bien, bravo. Vous avez de sérieux problèmes mon garçon, maîtrisez-vous un peu. Allez me mettre ces attardés dans leur enclos et évitez de vous faire bouffer un bras au passage, vous serez bien aimable. »

Je lui fis signe de partir d’un geste royal dont l’effet tomba complètement à plat. Le serviteur, peu concerné par mon charisme, s’en alla en trainant les pieds tellement bien que le sol après son passage n’avait jamais paru aussi éclatant. Je le regardai s’éloigner, hésitant encore entre l’incompréhension et l’amusement.
J’entendis des pas venir dans ma direction, ce qui me détourna du navrant spectacle ; je me retournai et fis face à un homme qui m’interpella des plus familièrement, son tutoiement allant de paire avec l’extrême mauvais goût de sa tenue. Scandalisé d’un tel accoutrement et manquement à la bonne éduction, je ne dis rien durant de longues secondes, me contentant de le dévisager de haut en bas avec un air dépréciateur.
Soudain, mon visage s’éclaira d’un sourire d’homme d’affaire, et je lui tendis la main comme le voulait la coutume entre gens bien élevés.

« Bien le bonsoir, monsieur Jack. Je suis la Quatrième Lame, c’est exact, Tibors Tiesce. Enchanté, vraiment. Alors, que puis-je faire pour vous ?, lui demandai-je chaleureusement. »

L'homme venait de reconduire un serviteur et tourna la tête vers Jack. Cet homme qui se tenait désormais face à lui, semblait le regarder de haut à tel point qu'on aurait dit un caméléon dont les yeux sont capables de faire des tours sur toute leur surface. Il n'avait encore jamais vu ça mais cette pensée du caméléon lui fit afficher un large sourire qu'il ne tenta même pas de masquer. Il se doutait que l'autre allait le relever mais il était si bien élevé qu'il ne lui ferait probablement aucune remarque à ce sujet. Oui, être bien élevé nécessite forcément d'être un brin hypocrite et de cacher ce qu'on pense. Mais Jack se foutait complètement de ce genre de choses, il était naturellement calculateur et cela ne lui demandait aucun effort. D'ailleurs, il était totalement du genre à fuir tout ce qui ressemble de près ou de loin à un effort donc si cela n'était pas naturel, il serait mort depuis longtemps.

Jack crut avoir déjà plus ou moins cerné le personnage lorsqu'il en entendit sa description dans les bruits de couloir et il s'attendait à se faire remonter les bretelles pour son langage un peu familier et brut mais l'autre n'en fit rien. Sans doute encore cette bonne éducation qui venait de frapper. Pffff rien à dire, son costume était impeccable, pas la moindre froissure ou grain de sable, la classe totale, cet homme était un carré, une forme géométrique parfaite en tout point. Jack qui pensait jusque là que la quinta était son opposée totale, constata qu'il en avait trouvé un encore pire qu'elle. Celui-là en terme de miroir opposé, était plutôt balèze dans son genre. Jack l'aventurier solitaire face à Môsieur Tibors, l'homme qui est tellement tiré à quatre épingles que les épingles semblent elles-même tirées à quatre épingles. Cette pensée fit à nouveau sourire le Jack, complètement fier de sa connerie.

Enfin bref, l'autre lui tendait la main avec un air amical depuis maintenant deux secondes pendant que Jack réfléchissait à ses conneries. Mais il n'y avait pas que des conneries qui lui circulaient dans la tête, il avait pas totalement confiance en ce gars-là et il hésita un instant à lui serrer la main, d'autant que ce n'est pas monnaie courante chez les Arrancar d'agir ainsi. Avec toutes ces capacités diverses et variées dont on ne peut soupçonner la nature, un simple toucher peut être dangereux. Jack prit donc la décision de se fier à son instinct, au risque de froisser son altesse, et déclina du plus poliment qu'il puisse, la main qui lui était tendue.

- C'est pas pour te froisser et ne considère pas ça comme un manque de respect, mais tu comprendras que je ne puisse toucher un inconnu comme ça, avec toutes ces capacités farfelues qui circulent, j'sais pas du tout à quoi m'attendre. J'ai survécu jusque là grâce à cette prudence et je suis sur qu'il en est de même pour toi. Je sais aussi que refuser un geste venant un Espada peut-être tout aussi dangereux et de ce fait je m'en excuse platement.

Jack avait cependant peur de cet homme, il ne savait pas de quoi il serait capable. Etant également lâche de nature, il tenta de s'abaisser un maximum pour faire passer la pilule, en espérant que celle-ci passe vraiment. Ce qui est sur c'est que si ces deux là viennent à se croiser à nouveau, Jack s'en tiendra éloigné le plus possible, il a l'air vraiment dangereux sous ses airs de gentleman endimanché. Puis il eut une idée.

- En échange, pour te prouver ma bonne foi et que je ne te manque pas de respect, demande moi ce que tu veux et je tenterai d'y répondre du mieux possible. J'ai des oreilles partout tu sais, si t'as besoin de savoir quelque chose sur quelqu'un n'hésite pas.

« Mon cher Monsieur Jack, je doute que vous puissiez m’être d’une quelconque utilité. »

Mon sourire aimable n’avait pas quitté mes traits, mes yeux eux pourtant ne devaient briller d’aucune chaleur. Ma main tendue se referma en un poing serré et mon bras s’abaissa contre mon flanc. Mon interlocuteur, d’une navrante paranoïa, venait d’attirer mon attention pleine et entière malgré lui. Je le fixais, l’air toujours avenant, et inscrivais dans ma mémoire son visage et son attitude, avec une précision des plus chirurgicales.
Je posai ma main derrière son dos et le forçai à marcher à mes cotés sans lui demander son avis. Par ce geste, j’escomptai lui signifier que si sa tête n’avait pas encore roulé à ses pieds, c’était grâce à ma bonne humeur, mais que ma patience avait certaines limites à ne pas franchir.
Je lui tapotai l’épaule amicalement sans laisser transparaître le moindre signe évident de la colère froide qui m’animait.

« Mon brave monsieur Jacko. Je peux vous appeler Jacko ? Qu’importe, c’est formidable que nous soyons tous deux ici, dans ce beau palais, lui-même dans ce désert superbe.
Mais vous devriez sérieusement songer à revoir vos manières, mon bon monsieur, elles sont exécrables. J’impute probablement cela à la vie rustre que vous menez au dehors. »

Je m’arrêtai puis me séparai de lui ; je fis quelques pas en avant et me tournai de nouveau vers lui. Mes mains se joignirent et je me mis à irradier d’un charisme sans mesure.

« Et oui, j’ai moi-même quelques oreilles qui traînent et votre réputation ne m’est pas inconnue. Vous, le trappeur sous le sable, le mangeur de poussière. Pourrais-je vous demander ce qui vous pousse à adopter un tel mode de vie ? J’ai peine à croire que le frisson de la chasse soit encore très présent.
Et puis il y a un dernier détail qui me chiffonne légèrement. »

J’étirai ma longue stature vers lui et mon visage ne fut plus qu’à quelques centimètres du sien. Le sourire que j’arborai jusque là avait à présent totalement disparu puisqu’ayant laissé sa place à une dureté que mes traits habituellement agréables ne laissaient supposer.

« Avez-vous simplement conscience que ceux que vous chassez appartiennent à votre propre race ? Et que leur laisser le temps d’évoluer comme chacun de nous a eu ici la chance, viserait à renforcer nos rangs ? Votre ingérence des affaires des Hollows, et vos lubies freinent notre effort de guerre, en avez-vous simplement conscience ?
Aussi vais-je être clair avec vous, mon bon Jacko. Si jamais l’un de mes petits protégés venait à tomber dans l’un de vos traquenards, il est fort possible que le monde creux ait à se passer de vos services. Et sachez que j’ai vécu bien longtemps, et que le désert ne serait pas suffisamment grand pour vous cacher de moi. »

Je me redressai, de nouveau paisible et rassurant. Je donnai l’accolade au cow-boy chaleureusement et l’invitai à continuer la marche, cette fois-ci, sans le forcer, comme si de rien n'était.

« Mais que cela n’entache pas notre amitié naissante, bien sûr. Alors, parlez-moi de vous. Vous plaisez vous à Las Noches ? Cela doit vous changer des dunes de sable blanc, je gage. Comment diable faites-vous pour aimer une telle désolation ?
Cela me dépasse. »

J’irradiai littéralement de contentement à m’écouter parler, et ma béatitude fut à la mesure de l’amour que je me portais. Ma colère avait disparu au profit d'une joie déraisonnée et idiote. La soirée s'annonçait superbe.

L'homme venait de perdre son sourire figé et avait affiché son vrai visage. Jack était satisfait, il avait réussi à faire tomber le masque de cet être qui se pensait supérieur au reste du monde. Comment un simple crétin avait réussi à faire ça? Cet idiot ne semblait même pas se poser la question, trop occupé à admirer l'odeur de ses propres flatulences. Enfin, cela n'était pas le but initial de Jack mais il était content d'avoir accompli ça par un heureux hasard. Et bien que le Reiatsu de cet individu demeurait impressionnant, Jack avait fini par s'y habituer et n'en avait plus peur désormais, alors ses vaines menaces lui passaient bien au dessus. Rien ni personne ne peut échapper aux ombres et si la difficulté venait à se faire trop importante, les ombres sont partout et la fuite est facile, instantanée et infinie si il le souhaitait. Sauf qu'un jour l'ombre peut frapper sournoisement et un combat perdu d'avance peut ainsi être renversé. Telle était la loi de la jungle... ou plutôt la loi de Jack.

Toutefois il ne souhaitait pas afficher le fait qu'il n'avait plus peur, il était important que cet idiot continue de penser que Jack avait encore peur de lui. Se rebeller maintenant n'apporterait rien de bon. Mais y a bien deux choses que notre cowboy ne supportait pas et l'autre venait de les faire les deux en même temps, qu'on le touche d'une quelconque façon et qu'on lui tapote l'épaule ou peu importe l'endroit. C'était un signe de dédain. L'autre se sentait sans le moindre doute infiniment supérieur. Les yeux de Jack devinrent rouge comme le sang et il afficha un sourire en coin, si à ce moment là il n'avait pas baissé la tête, masquant son visage derrière son chapeau, le Tibors aurait pu comprendre qu'à cet instant précis il venait de mettre un pied dans la nuit éternelle.

Bref, il lui mit la main derrière le dos et le força à avancer. Ses paroles énervèrent encore plus le cowboy qui avait désormais beaucoup de mal à se maintenir au calme.

« Mon brave monsieur Jacko. Je peux vous appeler Jacko ? Qu’importe, c’est formidable que nous soyons tous deux ici, dans ce beau palais, lui-même dans ce désert superbe.
Mais vous devriez sérieusement songer à revoir vos manières, mon bon monsieur, elles sont exécrables. J’impute probablement cela à la vie rustre que vous menez au dehors. »

"formidable", "beau", "superbe"... en une seule phrase il avait réussi à placer la panoplie du parfait crétin en costume. "Je t'en foutrais des Jacko moi, Môsieur Tibors." pensa-t-il. Mais il lui répondit toujours la tête baissée :

- Puisque tu me poses la question, je préfère m'en tenir à Jack, sans vouloir froisser ton superbe costume. Tu peux imputer mes manières à ce que bon te semble, je n'ai pas la chance d'avoir été choisi par notre Rei pour habiter dans ce majestueux palais, il m'est donc totalement inutile de revoir mes manières pour loger dans un désert.

Mais après quelques longues respirations il repensa à certaines conneries et ses yeux reprirent leur couleur jaune habituelle. Etouffant même un petit rire en repensant au coup des épingles. Rire maintenant aurait foutu en l'air tous ses efforts pour lui faire croire qu'il avait encore peur de lui, il dut donc intérioriser comme jamais. Il éclaterait surement de rire aussitôt sorti de là. Puis il reprit son incessant discours, il aimait s'écouter parler, aucun doute là dessus, peut être qu'en plus de l'odeur de ses pets il aimait aussi sa propre haleine? C'était fort possible.

« Avez-vous simplement conscience que ceux que vous chassez appartiennent à votre propre race ? Et que leur laisser le temps d’évoluer comme chacun de nous a eu ici la chance, viserait à renforcer nos rangs ? Votre ingérence des affaires des Hollows, et vos lubies freinent notre effort de guerre, en avez-vous simplement conscience ?
Aussi vais-je être clair avec vous, mon bon Jacko. Si jamais l’un de mes petits protégés venait à tomber dans l’un de vos traquenards, il est fort possible que le monde creux ait à se passer de vos services. Et sachez que j’ai vécu bien longtemps, et que le désert ne serait pas suffisamment grand pour vous cacher de moi. »

"Evidemment que j'en ai conscience, abruti. Si t'étais si bien informé que ça tu saurais que la plupart je ne les tue pas, je teste seulement mes pièges sur eux." pensa-t-il encore.

- J'y avais déjà pensé et j'ai déjà pris la résolution de cesser de les tuer, pour "l'effort de guerre".

Il avait envie d'ajouter un tas de choses à cette phrase mais celle-ci mourut sur ce point. Il aurait pu ajouter que le désert est bien assez grand au contraire, il aurait pu envoyer n'importe qui, le désert est le terrain de jeu de Jack, un imbécile en costume qui n'y a jamais mis les pieds ne lui ferait surement pas peur, il lui était peut être supérieur en force mais là le terrain serait nettement à son désavantage. Enfin ce n'est pas comme si il ferait les choses par lui-même, il enverrait surement des subordonnés se faire tuer à sa place afin de ne pas salir son beau costard avant de s'apercevoir que c'est inutile.

A peine eut-il le temps de penser à ça que l'autre semblait s'apprêter à déblatérer encore ses conneries incessantes, remplie de paroles aussi fausses que ses cheveux ridicules. Il se demanda alors si c'était des vrais? Il pensa soudainement à vérifier en lui tirant sa moumoute pendant que son visage était aussi près du sien et se retint à nouveau d'éclater de rire, ce qui aurait eu pour effet de recouvrir le visage de cet idiot avec des centaines de postillons. Ca aurait pu lui donner un certain look cela dit.

Enfin il s'était déjà redressé, donc c'était trop tard. Jack était curieux de savoir ce qu'il allait encore bien pouvoir lui dire.

« Mais que cela n’entache pas notre amitié naissante, bien sûr. Alors, parlez-moi de vous. Vous plaisez vous à Las Noches ? Cela doit vous changer des dunes de sable blanc, je gage. Comment diable faites-vous pour aimer une telle désolation ?
Cela me dépasse. »

Jack avait repris totalement son calme et il décidait d'entrer dans son jeu en lui répondant de la même façon.

- Bien sur que non, cela n'entachera pas notre amitié voyons, hohoho. Oui je dois dire que Las Noches est un très beau palais, j'ai peu l'occasion d'y venir mais cela me permet de rencontrer des êtres aussi formidables que toi donc j'ai désormais l'intention de venir plus souvent. Mais le désert a ses avantages, notamment les manières dont tu faisais référence précédemment, je n'ai pas à m'en préoccuper et je suis libre comme l'air, c'est comme un immense palais pour moi. Je t'assure, tu devrais essayer. Tout est une question de point de vue, c'est en ça qu'on se différencie, et surement en bien d'autres points qui en découlent. A l'occasion, n'hésite pas à me rendre visite, je serais ravi de t'accueillir, qu'en penses-tu?

Ainsi il pourrait montrer à cet imbécile qu'il n'est pas aussi fort qu'il le pense.

« Oh, le désert, un bel endroit, certainement. Courir parmi les dunes, sous la lune de notre monde, quoi de plus revigorant ? Néanmoins, je ne pense pas que la liberté se cantonne à pouvoir aller où l’on veut quand on le veut, mon cher Jack. Certes, c’en est une composante, mais pas l’essence. »

Je m’immobilisai devant l’Hollow-boy et lui lançai un sourire complice. Oh, je n’étais pas idiot, il ne m’aimait pas, et je ne l’aimais pas non plus. Mais les gens bien élevés savaient cacher ce genre de petits détails derrière des sourires bien affichés et il était certain que mon ami ci-présent, s’il n’était pas habitué à l’exercice, s’en sortait plutôt honorablement.
J’y percevais quelques fausses notes dans l’attitude ; des petits sourires affichés en coin, finalement peu discrets, des gestes de rejet, et un dédain profond dans son regard, mais rien qu’il ne pourrait pas corriger avec un peu d’éducation. Encore fallait-il que l’éducation, il souhaitait la recevoir et étant donné le personnage, j’en doutais fortement.

« Enfin, je serais ravi de venir vous rendre visite tant que promettez de ne pas m’envoyer au fond de l’un de vos pièges, dis-je en riant. Vous savez, malgré ce que vous pensez, je passe une majeure partie de mon temps hors de ces murs à vaquer à mes occupations qui, tout comme les vôtres, se passent essentiellement dans le désert. Ce qui me fait penser à une chose, justement. »

Je me tins face à lui, le dépassant de quelques centimètres, et me dotai de mon masque le plus avenant.

« Monsieur Jack, il se trouve que je supervise actuellement un projet qui me tient grandement à cœur et je me demande si vous, à l’aide vos compétences, ne pourriez pas être un atout plus qu’appréciable. Voyez-vous, mon activité consiste à fournir à notre roi une armée. J’ai pour tâche de façonner les soldats et m’assurer qu’ils deviendront de fiers combattants, et pourquoi pas un de nos prochains camarades ?
Or, il se trouve que l’étape la plus compliquée à recréer artificiellement est la transformation en Gillian. Je supervise ce que j’ai nommé « cueillettes », cela consiste à réunir nombre d’Hollows ensemble et espérer qu’ils fusionneront en Gillians. »

Je levai les yeux au ciel, blasé par la chose.

« Hélas, ils se bouffent généralement entre eux avant même d’avoir entrepris une quelconque transformation. Le processus est aléatoire mais porte ses fruits. Parfois.
Donc !
Monsieur Jack, réunir un tel nombre de Hollows prend du temps. Leur courir après est extrêmement fatiguant, je dois dire, et c’est justement là que vous pourriez vous montrer utile. Transformez vos fabuleux pièges en traquenards pour Hollows, regroupez les dans des cages, et livrez les moi en vie, et en relatif bon état.
Votre prix sera le mien. »

Je lui tendis de nouveau la main, non plus pour le saluer, mais pour clore notre marché si l’offre lui convenait.

« Je sais vos réticences quant aux échanges tactiles, mais rassurez vous, mes capacités ne font guère dans la subtilité, et vous les sentiriez rapidement si d’aventure j’en faisais usage sur vous. Puisque je vous dis qu'il ne vous arrivera rien, je ne mens pas. Je place la confiance comme ciment de mes partenariats. »

Mon sourire s’épanouit et dévoila mes dents aiguisées.

« Alors, qu’en dites-vous ? Partenaire ? »

Jack ressentit un certain enthousiasme à la proposition du Tibors, c'était la première fois depuis le début de cet interminable entretien composé de moqueries mutuelles et de boutades dissimulées derrière des visages aimables. Les piques allaient bon-train, ce petit jeu ne déplaisait pas à Jack qui était de nature joueur et aimait les joutes verbales mais il n'était cependant pas mécontent que cela s'arrête, ce n'est jamais bon de jouer à ça avec un Espada, ces mecs là ont en général une haute estime d'eux-même et se vexent facilement. En plus l'hollow-boy avait quelques soucis d'égo également, n'aimant pas se sentir inférieur, il avait tendance à avoir la moutarde qui lui montait au nez avec certains interlocuteurs comme ce fut le cas là mais il avait fini par reprendre totalement son calme et à l'écoute de cette proposition c'était plutôt de l'intérêt que cela avait suscité en lui et le Tibors remontait dans son estime en flèche. Il reconnut là l'homme d'affaire qu'il devait être et le calme qu'il avait su garder malgré le début de conversation agité lui plut énormément.

Il n'était cependant pas trop d'accord avec sa définition de la liberté, si celle-ci n'est pas justement d'être totalement libre d'aller où l'on veut et de faire ce que l'on veut et quand on le veut, alors qu'est-ce? Enfin ce n'était qu'un détail et rétorquer à cela n'avait pas beaucoup d'intérêt. Bref, Tibors lui tendit la main, après cette conversation il avait abandonné la méfiance du début et se sentit cette fois en mesure de répondre favorablement à cette norme humaine. Il empoigna donc la main de Tibors et l'agita en esquissant un sourire sincère cette fois. Il n'avait d'ailleurs plus envie de le provoquer et adopta le vouvoiement qui semblait être important pour lui.

- Je dois dire que votre proposition m'intéresse grandement Monsieur Tibors, bien que vous n'ayez rien qui puisse m'intéresser pour le moment, j'accepte le marché, je vous le ferai savoir si un jour j'ai besoin de quelque chose. J'imagine que cela vous convient ainsi?

Jack repensa à son plan sur le long terme, il aurait bien besoin d'un subordonné pour une durée indéterminée afin de l'aider mais il n'avait pas encore suffisamment confiance pour le lui demander maintenant. C'était surtout la raison qui le poussa à garder ce service comme un atout dans sa manche qu'il pourrait ressortir à un moment plus opportun. Il cachait bien son jeu mais Jack avait un esprit relativement vif et lorsqu'il avait un bon jeu en main, il aimait l'exploiter à son potentiel maximum. Il savait parfois être un fin stratège lorsqu'il arrivait à calmer ses pulsions car un de ses défauts était qu'il était impulsif et lunatique, cela lui jouait des tours. C'était son côté très sombre qui remontait. Il sortit une cigarette d'une tape sur sa main et se la ficha dans le bec avant de se l'allumer avec son plus beau briquet orné d'un as de pique en son centre, petit rituel qu'il avait pris l'habitude d'accomplir. Il tendit son paquet à Tibors, c'était en quelque sorte sa poignée de main à lui mais si il refusait il n'en ferait pas tout un plat.

- Vous en voudrez bien une pour conclure notre accord? Vous avez le droit de refuser, je ne vous en tiendrai pas rigueur. Sinon, dans combien de temps souhaitez vous que je vous livre votre "colis"?

Je me saisis de la cigarette si gentiment proposée par mon nouveau partenaire et la porta jusqu’à mes lèvres, sans faire mine de vouloir l’allumer. Je la fumerai plus tard, sur le toit du palais, en contemplant la lune froide au dessus du désert. Un moment de poésie arraché à la nuit du monde creux.
Je m’égarai alors que mon nouvel ami m’attendait. Mon sourire s’élargit au même rythme que ma satisfaction grandissante ; je le remerciai de son offrande par un hochement de tête. Cette conversation qui avait commencé sous de mauvais augures s’apprêtait à trouver une conclusion plus heureuse. L’Hollow-Boy avait quitté son apparat de dédain pour se montrer plus aimable, et chose que j’appréciai tout particulièrement, avait même daigné accepter ma poignée de main malgré ses craintes premières. Cerise sur le gâteau, j’avais à présent le droit à un exquis vouvoiement.

« Fort bien, monsieur Jack, vous me direz donc votre prix ultérieurement. Je vous invite simplement à vous monter raisonnable, un échange se fonde sur un principe d’équivalence, savez-vous ? »

Je sortis de ma veste un stylo, un carnet, et entrepris de gribouiller le nom de Jack suivit de l’offre, les modalités de vente, et de sa durée probable. Sur ce dernier point, j’envisageais plusieurs années d’étroite collaboration, je souhaitais ne pas subir d’âpres déceptions.

« Mais je suis content. Nous sommes parvenus à nous montrer productifs, et cela est bien. Concernant vos questions, livrez moi chaque troupeau composé d’au moins vingt cinq têtes. Si vous le pouvez, n’hésitez pas à mettre à part ceux qui vous semblent être les plus féroces. Cela est généralement synonyme d’une individualité exacerbée, et je serais fort heureux de créer un Gillian composé uniquement de ce genre de bêtes. Peut-être est-ce même ainsi que naissent les futurs Vasto Lordes.
Mais je tergiverse, pardonnez-moi.
Prenez le temps qu’il vous faut, je ne suis pas tenu à des délais, du moment que ce qui doit être fait l’est effectivement. Mettons que je reviendrai vers vous d’ici un mois afin de savoir où en sont vos préparatifs. »

Je frappai des mains, applaudissement éphémère d’un enthousiasme certain.

« Je pense que nous pouvons terminer notre entretien ici, monsieur Jack. À moins que vous ayez encore quelques questions ? »

Un nouveau sourire s’étala sur mes lèvres, bienveillant.

« Fort bien, monsieur Jack, vous me direz donc votre prix ultérieurement. Je vous invite simplement à vous monter raisonnable, un échange se fonde sur un principe d’équivalence, savez-vous ? »

- Cela va de soi. Ne vous inquiétez pas je ne vous demanderais rien qui soit hors de votre portée ou de supérieur à l'effort que votre travail m'a demandé. Soyez tout de même conscient qu'il ne m'est pas aisé d'attraper vingt-cinq têtes et de tenter de séparer ceux qui me semblent les plus virulents. D'autant que je vais devoir agrandir et solidifier certains de mes repères pour pouvoir les garder, normalement je ne les garde pas aussi longtemps donc cela nécessitera quelques travaux d'aménagement. Je vous tiendrai au courant de l'avancée de la situation au plus vite.

« Je pense que nous pouvons terminer notre entretien ici, monsieur Jack. À moins que vous ayez encore quelques questions ? »

- Je n'en ai pas pour l'instant, monsieur Tibors. Notre marché étant conclu, je m'en vais me mettre au travail de ce pas.

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