Seule son ombre accompagnait les pas silencieux du Tercera, qui traversait la forteresse du Rey. A l’image de son avancée, il ne put s’empêcher de penser qu’il avait fait le choix le plus judicieux qui s’imposait. Comment croire qu’avec la puissance – certes probablement moins élevée que certains rares autres – qu’il avait accumulée surtout récemment avec le nombre impressionnant de Hollows qu’il y avait dans les différents mondes, on l’aurait laissé tranquille lui qui s’était caché quasiment toute sa vie ? C’était impossible. A l’image de Sôsuke Aizen, des Quincys ou même des Ombres : plus on acquiert du pouvoir plus nos ennemis sont nombreux.

L’instinct de survie avait toujours primé chez l’Arrancar. Sa seule peur était derrière la mort : le fait de ne plus assister à rien, de ne plus réfléchir, de ne plus prendre conscience des choses. Depuis qu’il était devenu un Adjuchas et même un Gillian, sa pensée avait évolué. Et il s’était attristé de savoir qu’avant, il n’avait été qu’un Hollow comme les autres, où l’instinct primitif dominait le reste. Lui qui avait progressivement découvert l’intelligence, la parole et tant d’autres choses évoluées, il ne pouvait se faire à l’idée de les perdre.

Et l’appel de Sima qu’il avait ressenti l’avait poussé à se découvrir. Comment ne pas penser que cet appel n’était peut-être en réalité qu’une façon de repérer certains Arrancars, afin de venir les recruter ? Si cela était vrai, et que pour éviter de mourir Aaròn se devait de rejoindre l’armée du nouveau Rey, pourquoi ne pas le faire de lui-même avant ? C’était ainsi qu’il était rentrée dans Las Noches, et qu’en peu de temps, sa valeur avait été reconnue et primée par son rang de Tercera Espada.

Santo Pastor l’avait reconnu. Et en ses actions et sa parole : l’appel de Sima était devenue une réalité. C’était d’ailleurs pour en savoir plus que le Nada entra, et apparut devant son Rey.

─ Bonjour, mon roi.

Il s’inclina, jusqu’à embrasser le sol avec son poing droit. Puis il se releva, et s’approcha de quelques pas, avant de s’arrêter.

─ Je suis venu vous proposer de venir à Nacimiento en ma modeste compagnie.

Il ne savait pas très bien si le Rey était occupé ou non. Peut-être allait-il l’accompagner dès aujourd’hui, peut-être que non. En tout cas, le Tercera avait jugé que cette proposition pourrait être enrichissante et y voyait un intérêt certain. Il s’abaissa une nouvelle fois, mais ne se retourna pas tout de suite. Car comme il l’avait déjà pensé : peut-être que sa requête allait être exaucée dès aujourd’hui.

Aaron avait le mérite de le traiter avec toute la déférence que demandait le rang de Rey. L'ayant vu s'approcher, Santo posa sur lui un regard bienveillant. Son Tercera était zélé, plus que beaucoup de ses Espadas, et cette motivation avait suffit à décrocher sa place dans le trio de tête. Avait-il toute la confiance de Santo ? Pas encore, malheureusement. Ce dernier avait conversé avec Thétys et avait conclu avec elle que les plus proches de ses alliés étaient ceux dont il devait se méfier le plus. Il ne connaissait pas encore assez Aaron et ses souhaits ; s'il semblait résolu à rendre sa splendeur à la race Hollow, ce n'était peut-être qu'un rideau de fumée.

Santo s'étonna de la demande de son Tercera, un peu surgie de nulle part. Quel était le but derrière tout ceci ? Il ne s'inquiéta guère, ne s'attendant pas à une tentative d'assassinat sur son fief (et la présence de Thétys était de toute façon assurée pour tuer dans l’œuf toute tentative meurtrière). Mais la soudaineté de cette proposition était curieuse.

« Visiter la cité avec toi ne serait pas une mauvaise chose, Tercera. Mais j'aurais au moins aimé que tu me dises dans quel but tu souhaites que je t'accompagne. J'ose espérer que ce ne sera pas en vain. »

Inutile de faire durer l'entretien : Aaron souhaitait qu'il l'accompagne, il l'accompagnerait. Santo ne manquait dernièrement aucune occasion de se montrer à l'extérieur du Palais. Trop longtemps, il s'était tenu loin du regard des fidèles. Il devait faire acte de présence, rappeler la voix de Sima dans leurs cœurs et montrer que Nacimiento n'était pas qu'une promesse à court terme. Se redressant de son trône, Santo descendit les marches jusqu'à rejoindre sa Troisième Lame.

« Allons-y. Dis-moi pourquoi tu souhaitais converser avec moi. Je suppose qu'il s'agit précisément de Nacimiento, puisque nous nous y rendons ? »

Le Rey ne tarda pas à se lever, mais l’entretien aurait pu mieux commencé. Il fut vrai qu’Aaròn aurait du en dire un peu plus sur ce qu’il voulait, durant cette visite à Nacimiento. Il espérait que ça ne soit pas pour rien, et il serait exaucé. Le Tercera pouvait être qualifié de tout et n’importe quoi, il n’avait jamais fait quelque-chose sans avoir une idée précise derrière la tête. Prévoir était le mot clé de sa ligne de conduite. Et inviter son roi à venir avec lui n’allait donc pas se limiter à une simple ronde partagée. Mais à bien plus…

─ Oui, mon roi.

Dit-il avant de s’abaisser une nouvelle fois. Il attendit que Santo Pastor ouvre la marche, et il se releva, avant de le suivre vers les profondeurs du palais. Ce fut donc dans la grandeur de Las Noches que le messager de Sima s’intéressa à ce que son Tercera souhaitait, sous-entendant qu’il s’agissait sans doute de Nacimiento. Il était logique de raisonner ainsi, puisque c’était là-bas qu’ils allaient converser le plus longuement possible.

Le Nada n’avait aucune mauvaise idée derrière la tête. Il ne voulait rien tenter et il était totalement dévoué à son supérieur. Cependant, il y avait un point sur lequel il n’était pas en total accord avec lui. Et c’était justement ce qu’il représentait. Car plus que le Rey, plus que celui qu’on voyait comme le plus puissant des Arrancars, plus que le leader de toute une race : il était le messager de Sima.

─ Le nombre de Hollows grandit chaque jour et ce depuis l’Appel. Nacimiento est née de ce grand nombre et du culte de Sima. Ces évènements sont importants et marquent une nouvelle ère pour notre peuple, celle de votre règne, mon roi. Cependant, tous ne partagent pas le même avis concernant Sima, et concernant votre rôle de messager.

Il s’arrêta, mais pendant très peu de temps : tout juste assez pour reprendre sa respiration. Il savait bien que s’il s’arrêtait là, on pourrait difformer ses propos. Et il en était hors de question.

─ Mon rôle est de veiller à la sécurité de Nacimiento. Mais nous ne pouvons fermer les yeux sur ce qui arrivera tôt ou tard : un rassemblement d’hérétiques. Ceux qui ignorent l’Appel se chercheront, et une fois qu’ils seront assez nombreux, ils représenteront une menace.

Les deux Arrancars voyaient désormais la sortie de Las Noches, alors que la prise de parole du Tercera allait bientôt se conclure.

─ Je suis persuadé que si Sima n’a pas montré d’autre signe que son Appel, c’est uniquement pour que nous puissions reconnaître les justes, ceux que nous devons protéger et les hérétiques, ceux que nous devons écarter. C’est pourquoi, pour les reconnaître, j’aimerais savoir si vous m’autorisez à infiltrer certains Arrancars que j’aurais choisis pour qu’ils mènent eux-mêmes l’enquête. Car jamais un non-croyant seul se montrera lors d’une de mes rondes. Mais c’est autour d’alliés ou de faux alliés qu’il se dévoilera.

Nacimiento n’était plus qu’à quelques pas… Cela collait bien avec le discours. Car bientôt, il serait difficile de parler librement, même si le Rey n’avait rien à craindre.

Il ne fallut que quelques secondes aux fidèles pour reconnaître Santo, s'alerter les uns les autres et s'amasser aux Portes. Ce n'était là que les plus fanatiques de ses disciples, ceux qui, trop souvent, confondaient le Dieu et le Messager. Ils voyaient en lui Sima, ils le voyaient comme l'absolu, alors qu'il n'en était rien. Quelques uns de ces dévots surveillaient en permanence la porte, attendant de le voir apparaître ou, à défaut, de voir un Espada porteur d'un éventuel message et c'était ces vigies qui avaient alerté de la sortie du Rey. La nouvelle s'était répandue comme une invasion de sauterelles, le mot sautant de bouche en oreille, jusqu'à créer une masse compacte de croyants qui appelaient son nom, poussaient et bousculaient, tendant leurs mains, leurs pattes et autres membres dans sa direction. Les Hollows placés en garde les repoussaient avec difficulté, mais une certaine discipline régnait : les fidèles savaient qu'ils ne pourraient pas approcher sans autorisation de Santo, sans quoi la punition serait immédiate.

« Un raisonnement juste, Aaron, jusqu'à un certain point. Il y a des hérétiques. Des gens qui ne croient pas. Et pire : des gens qui prétendent que je mens. »

Santo s'avança, ouvrant les bras vers ses fidèles. La garde jeta vers lui un regard d'abord peu assuré, avant de reprendre le dessus et de calmer les plus effrénés des rassemblés. Les mains tendues vers la foule, le Rey les leur offrir et recueillit les baisers et les étreintes. Il murmura des bénédictions, écouta les suppliques, appela à l'unité. S'arrachant à leur ferveur, il se tourna vers sa Troisième Lame.

« J'ai conscience de tout ceci, tu dois t'en douter. Je savais, au moment où Sima m'a fait son Messie, que convaincre tous les Hollows serait une tâche ardue et probablement impossible. La foi n'est pas inscrite dans nos gênes. Suivre non pas le plus fort mais le plus sage est contre notre nature. Et nombreux sont-ils à ne pas pouvoir aller contre leur nature.
Je ne chasserai pas les hérétiques, Aaron. C'est contre mes intérêts et ceux de Sima. Notre Père veut une armée pour renverser les autres races et redonner au Hollow sa place de prédateur suprême. Et pour cela, nous ne pouvons nous permettre de nous priver de soldats potentiels. »

Le rassemblement gagnait en ampleur. Si les plus fanatiques s'étaient pressés les premiers, à présent d'autres approchaient. Ceux qui ne faisaient pas le pied de grue devant le Palais, ceux qui n'avaient jamais vu le Rey, ceux qui voulaient se rassurer par sa présence. Comprenant qu'une piqure de rappel n'était jamais une mauvaise chose, Santo ordonna d'un geste à ses gardes d'ouvrir un passage. Cela ne se fit pas sans mal. Beaucoup poussaient, certains semblaient sur le point d'en venir aux mains ; mais cela aurait été très mal avisé de leur part, sous les yeux du Rey. Enfin, un couloir se dessina, dans lequel s'engouffra Santo, suivit par son subalterne. Malgré les cris et l'agitation, le Messager parvenait à se faire entendre de son interlocuteur, finissant son raisonnement.

« Ils ne sont pas une menace immédiate et tant qu'ils ne mettront pas en danger ce grand projet qu'est le Culte de Sima, je serai tolérant avec eux. Une erreur, penseras-tu, mais nos efforts doivent être concentrés sur le recrutement de fidèles et la fortification de notre armée. A l'heure actuelle, ils ne sont qu'une minorité et n'ont pas la possibilité de se révolter : ils se feraient tuer aussitôt. Leur seule chance de porter atteinte à Sima, Nacimiento et les milliers de croyants ici rassemblés, c'est en me tuant. Et crois bien, Aaron, que c'est un risque que j'ai déjà pris soin de palier. »

Quelque part, dans cette foule, son ombre, son ange gardien, Thétys, veillait. Et c'est sans la moindre crainte qu'il s'enfonça dans sa cité.

C’est une foule tellement conséquente qu’Aaròn se demanda si ce qu’il voyait était vrai. Mais cette hésitation ne dura qu’un court instant. Le peuple adorait le Rey, il l’adulait. Il n’y avait rien d’anormal dans le comportement de ces Hollows qui figuraient sans doute parmi les plus croyants. L’Appel avait éveillé les mémoires et les instincts. La race voulait que seuls les plus forts persistent, et ce fut donc logique que Sima apparaisse comme une volonté supérieure, quelque-chose de plus grand que n’importe qui. Le Hollow Originel existait, il avait fait entendre sa voix, et avait choisi son messie. Et devant quelque-chose qui les surpassait, chaque Hollow et Arrancar s’était résigné, questionné ou décidé à comprendre et à approuver ce changement.

Mais l’euphorie restait contenue. Premièrement par les gardes, et aussi par ce qu’ils connaissaient de leur nouveau roi. L’Espada et Sima étaient là pour le protéger. Le moindre contact dangereux, la moindre prise de parole fragile et la punition serait immédiate. Il savait cela, comme il l’expliqua à son Tercera, qui ne faisait qu’écouter. Jusqu’à ce que Santo Pastor ait terminé.

─ Et même si ça n’était pas le cas, je suis là, mon roi.

Il s’enfonça avec le Messager dans la plèbe. Nacimiento était bondée, et au final, les croyants – ou non – restaient relativement à l’écart de leur roi et de sa Troisième Lame. Ceux-là pouvaient continuer de marcher plus ou moins paisiblement. Et il en était de même pour leur conversation en cours, très chère au Nada.

─ J’ai compris, mais n’oubliez pas que Sima vous a désigné parce que, justement, vous avez la croyance et l’esprit en plus de la force pour diriger notre peuple. Votre clémence et votre logique sont toutes à votre honneur, mais certains ici n’ont justement pas ce dernier.

C’était une chose sûre que les hérétiques n’étaient pas nombreux, et encore moins prêts à se révolter. Ils ne pouvaient actuellement rien face au Rey et à son Espada. Mais il y avait toujours des possibilités, des failles potentielles. Et malheureusement, Aaròn ne connaissait pas encore assez bien son roi pour savoir s’il avait pensé à tout. C’est de là qu’était né son désir d’aller plus loin dans son rôle de gradé et de protecteur du Hueco Mundo. Prévenir plutôt que guérir. Mais si le Rey ne jugeait pas ça nécessaire pour l’instant, alors le Tercera y réfléchirait, et engagerait à la limite un espion ou deux au maximum…

─ Je réfléchirai plus en détails sur l’éventuel espion de Nacimiento. Cependant, y a-t-il quelque-chose que je puisse faire en ce moment, pour vous aider d’une quelconque manière en dehors des rondes que je fais dans cette cité ou dans autour de votre palais ?

Il aurait pu poser des questions plus personnelles, mais le moment aurait été mal choisi. Pendant qu’ils marchaient à Nacimiento parmi tant de fidèles – malgré la sécurité – il était préférable de rester dans des sujets moins secrets. La discussion pourrait ensuite évoluer de différentes manières…

La foule l'observait passer avec une révérence respectueuse. Les cris s'étaient calmés, même si des éclats de voix explosaient parfois dans la masse grondante des Hollows. On l'interpellait parfois, des doléances, parfois des reproches jamais exprimés de façon directe. La crainte d'une punition divine, probablement. Les premiers jours, les nouveaux venus de Nacimiento (et même ceux qu'il avait converti bien avant d'arriver dans le Palais) étaient toujours un peu sceptiques, défiants, testant les limites de cette nouvelle loi imposée par Santo. Nombreux avaient-ils été à le confronter, à chercher à l'attaquer pour prendre sa place ou contester son statut de Messager divin. Le Rey avait, à l'époque, vaincu par la force ces rebelles, marquant de fait sa suprématie. Mais c'était une solution contreproductive : il ne voulait pas inspirer la crainte de sa punition mais bien de celle de Sima. En frappant de son bras, il se positionnait comme un bourreau, tels que l'avaient été Barrigan, Aizen ou Grimmjow. Il ne voulait être qu'un guide, respecté parce qu'il avait une légitimité offerte par une force bien supérieure à celle des Hollows.

« Si tu tiens tant à placer Nacimiento sous surveillance, fais, Aaron. Tant que ton travail de pacification est fait, je n'y vois pas d'inconvénient. Même si je doute qu'une poignée d'espions parvienne à donner des résultats. Je crains plus les menaces à l'intérieur du Palais qu'à l'extérieur, à dire vrai. Et ne t'inquiète pas : ce danger est aussi sous contrôle. »

Ne pas tuer les révolutionnaires qui voulaient prendre sa place avait été un problème pour Santo. Comment tenir à leur place ceux qui n'avaient pas l'intelligence de comprendre qu'il ne valait mieux pas le défier ? Malgré sa foi, le Rey n'avait pas pu à l'époque confier son destin entre les mains de Sima. Ce serait parier gros sur la seule foi, et la seule foi ne sauvait pas des tentatives d'assassinat.

« Je salue ton désir d'implication Aaron et je t'en suis gré. Ta dévotion t'a valu ton rang et je suis heureux de te voir faire ton possible pour le conserver. Pour l'heure, nous en sommes encore à renforcer notre armée. A renforcer la foi de nos frères. Oh ! je ne te cache pas que je prépare les prochains coups. Les Shinigamis et les Reapers sont un souci quotidien pour moi. Et l'idée que notre espèce est continuellement massacrée dans le monde des Humains est une torture. Mais la hâte serait notre pire ennemi. Si tu as des idées, n'hésite pas à les partager. Mais pour l'heure, Nacimiento ne me parait pas être une priorité comme elle l'était quelques mois plus tôt.

C'était alors que Santo avait imaginé la possibilité d'être protégé par un garde-du-corps d'élite. Un ou plusieurs individus voués à sa sécurité, à éliminer les menaces à sa place, de façon discrète... une mise à mort venue de nulle part, donc forcément oeuvre de Sima. Ainsi, non seulement il gardait sa place et éliminait les menaces, mais il dissuadait également d'autres prétendants au putsch, en renforçant la croyance des siens. La question de trouver un protecteur suffisamment doué et dévoué avait trouvé sa réponse en Thétys.
Une histoire qui continuait de s'écrire à ce jour.

Le roi n’avait au final rien contre le fait d’avoir des espions à Nacimiento. Mais il semblait préoccupé par autre chose. En effet, tout indiquait que la cité n’était plus sa priorité, comme elle l’avait été les semaines et les mois d’avant. Il fallait avouer que l’époque d’instabilité et d’inconnu était révolue. Nacimiento était connue de tous, et rassemblait de nombreux fidèles et curieux. Il n’y avait plus autant d’incidents qu’il y en avait eu. Et Aaròn n’y était pas étranger, il avait beaucoup œuvré pour que la cité soit un lieu pacifique. C’était donc avec une certaine fierté – toutefois dissimulée - qu’il accueillait les propos de son seigneur et le fait qu’il ne considérait plus la cité comme sa priorité.

Il engagea un sujet des plus délicats mais des plus connus : les Shinigamis, et désormais les Reapers. Etait-il juste de dire que ces derniers étaient les ennemis de Las Noches ? Tous les éléments connus allaient dans cette voix. En fait, ils pouvaient être considérés comme des Shinigamis, étant bien plus nombreux puisque s’occupant du reste du monde. Mais – et là c’était une question bien plus complexe – pouvaient-ils être considérés comme une menace plus grande ou des ennemis plus… importants à cibler ?

Le Nada n’y avait que peu réfléchi, sûrement parce qu’il savait que c’était à Santo Pastor d’en décider. Mais il était curieux de savoir vers qui allaient se diriger ses premiers ordres. Dans les deux cas, la Troisième Lame serait là.

─ J’ai toujours prôné la patience et la connaissance. Plus nous en saurons sur ce qu’il se passe au Seireitei et sur les Reapers, et plus vous serez à même de prendre les meilleures décisions pour notre peuple.

Le savoir, quelque-chose qui était propre à Aaròn mais aussi à d’autres, comme les membres de l’Exequias. Mais pour en savoir plus sur le Seireitei actuel, il n’y avait pas quarante solutions. Bien qu’en y réfléchissant davantage, le Nada aurait peut-être d’autres idées à l’avenir.

─ Puisque vous me permettez une suggestion, il semble important de noter le point de liaison entre nos deux mondes : les Vizards. Je pense qu'il est possible de se pencher là-dessus. Peut-être qu'un Vizard du Seireitei ou qui n'y est pas rattaché pourrait être rallié à notre cause si nous lui apportons des arguments convaincants. D'ailleurs, même si j'en doute, il est possible que certains d'entre eux aient entendu l'Appel.

Il s’arrêta, puis regarda son roi. Il savait de toute façon ce qu’il en adviendrait, au final. Et c’était une bonne chose, car plus que jamais, il avait confiance en Santo Pastor et en ses décisions. C’était ce qui lui avait valu d’être Tercera Espada, mais c’était également ce qui lui avait permis d’en être fier.

─ Quoi que vous décidiez, je serai là pour vous aider, mon roi. Qu’importe la tâche que vous me confierez.

Il n’y avait là que la stricte vérité.

Santo ne laissa pas paraître la suspicion et le doute qui venaient de faire leur apparition dans son cœur. Son regard continua de se porter sur la foule qui continuait de les encadrer, alors qu'ils poursuivaient leur marche dans la cité-fourmilière. Imperceptiblement, le Rey orientait son Espada vers la gauche, dans le but d'effectuer ensuite un cercle parmi la foule et les cabanons, pour revenir sur leurs pas. Ils avaient déjà le Palais sur leur droite, majestueux édifice, cathédrale blanche qui était le bastion de son armée. Leur promenade ne pouvait de toute façon pas durer éternellement.
Aaron avait eu l'idée d'utiliser les Vizards, et le Roi s'étonnait de le voir arriver à des conclusions similaires aux siennes. Était-ce de la prétention de sa part, ou bien du mépris pour son soldat, mais en tout cas, il avait fait preuve d'une vivacité d'esprit appréciable. Inutile de lui détailler cependant les projets liés aux Vizards dans ses rangs. Peut-être n'avait-il pas vu aussi loin... et de toute façon, Aaron n'avait aucune affaire à voir avec l'implantation d'un espion parmi le Seireitei.

« Oh, ils ont entendu l'Appel de Sima, je le sais. Il est moins puissant et moins clair que pour nous autres Hollows, mais il reste présent. Je doute cependant qu'il parvienne jusqu'à leur monde souillé. En tout cas, les Vizards foulant le désert savent que Sima est leur sauveur, et ceux déjà à mon service me l'ont confirmé. L'un d'entre eux a d'ailleurs récemment intégré l'Espada et y occupe la Quatrième place. Usagi Kazuhide, ancien Capitaine. Beaucoup de potentiel et il me parait aussi dévoué que tu l'es. Je t'invite, si tu le souhaites, à le rencontrer. »

Le Rey garda évidemment sous silence le nom de Thétys, et également celui de Rhodée, son alter-ego. Même si Aaron la connaissait, pour une raison ou une autre, sous cette deuxième appellation, ce serait suspect et curieux que Santo connaisse ce nom... Quoique. En tant que Rey, il connaissait une grande partie des occupants de son Palais ; mais peut-être la guerrière ne s'était-elle jamais présentée comme une Vizard et cultivait le secret sur sa réelle nature. Dans tous les cas, ne pas la mentionner était préférable.

« Je n'ai à ce jour aucune mission particulière à te confier. Les choses se stabilisent enfin et bientôt, les pièces seront en mouvement. A ce moment-là, je ferai appel à tes services. Ta retenue fait ta force, Aaron. Je sais que tu ne laisseras pas une situation dégénérer. »