- SIIIIIIIIIIIIIIIIIMA!

On ne changeait pas une équipe qui gagne, et le petit homme était tout à ce qu'il faisait. On lui avait demandé d'y mettre du cœur, aussi y mettait il toute son âme morcelée à la tâche. Que voulez vous, il était invariablement généreux, le petit. Peut être était ce la raison de sa convocation dans le saint des saints, chose assez unique pour être soulignée - l'idiot n'ayant jamais été vraiment dans les bonnes grâces des instances dirigeantes de Las Noches. On connaissait son pouvoir destructeur, ça oui. Mais le traiter comme un Espada à part entière, beaucoup s'en gardaient. Et il avaient absolument raison. Il ne prêtait absolument pas à confiance - et plus fou que lui était celui qui irait sans appréhension s'appuyer sur lui - et ne pouvait de toute manière être contrôlé efficacement. Sauf peut être par le Maitre. Mais bon, son côté électron libre en faisait un parfait gardien des bidonvilles, puisqu'il instillait une terreur sans nom dans l'âme des Hollows grouillant aux pieds du palais blanc. Si la justice était aveugle, la folie l'était aussi. Elles pouvaient donc s'entendre à merveille. N'était ce pas la raison de la présence d'un bouffon en chaque cours?

- Ladidoum, ladadam...mangez des champignons, c'est doux, c'est bon!

Il avalait la distance, passant rapidement d'un couloir à l'autre. Il avait le poil beau, l'oeil joueur, la truffe humide...

- Et c'est ainsi qu'il parcourt les derniers mètres, Simone!

-Oui je vois ça Jean Mimi, il est parti sur sa lancée, mais Oh, il ouvre la porte!

- Il est fier, il est beau, il envoie le pâté!

Et la porte immense s'ouvre sur une salle aux mêmes proportions. Et il arrive, le visage baigné d'un rayon de lumière. L'univers explose, la vie apparrait, et lui il devient VIP au pays des Arrancars.

Il est reçu chez le Rey.

- Oh mon dieu, j'en peux plus, bouhouhohuhouhhuahazehzaeza!

- On se calme, Simone, voyons! Ça va aller, prenez un mouchoir.

Il est des individus qu'on doit parfois classer dans deux catégories à la fois : celle des gens dont on a besoin et celle des gens dont on se passerait bien. Ces indispensables emmerdeurs sont trop souvent nombreux, et trop souvent conscients de leur statut. Ils en abusent, sachant que, quoiqu'ils fassent, quoiqu'ils disent, on aura besoin d'eux et donc, on fera silence sur leurs agissements. Mais il reste une caste trop rare, celle des fouteurs de merde disciplinés. Ceux qui peuvent vous mettre un bazar record, en très peu de temps, mais ont la décence, l'intelligence ou la discipline de comprendre que les actes de destruction massives demandent un contexte favorable. L'énergumène qui entra en fanfare dans la Salle du Trône était de cet acabit.

Aleksi n'était pas l'Espada que Santo connaissait le mieux, incontestablement ; et pourtant leur unique rencontre, à sa prise de pouvoir, avait suffit au Rey pour le cerner dans les largeurs. Il pouvait le résumer à une expression : bombe à retardement. Bombe à confettis ou à Ceros, difficile à dire, mais il semblait en permanence en équilibre entre la civilité toute relative de la majorité des Hollows et le carnage déraisonné et gratuit. Il semblait cependant, eu égard à son passif dans le Palais et au sein de la précédente Espada, qu'il était capable de se maitriser, faisant donc de lui pas seulement un membre de la fameuse catégorie des gens dont on se passerait bien, mais aussi de celle des individus nécessaires à l'avenir du Palais. Car une puissance de destruction restait une puissance, même si celle-ci risquait de se retourner contre vous.

« Salutations à toi, Aleksi. Heureux de te voir de retour parmi nous. J'imagine que tu as une justification à ta présence au Palais, sans quoi Borick ne t'aurait pas laissé franchir ses murs. »

Sans le dire, il invitait évidemment son subordonné à partager cette raison. Disparaître de la circulation à un moment aussi critique que la stabilisation de la cité et de l'entrée en guerre progressive de Las Noches était une folie dont le Rey se serait bien passé. Connaissant le concerné, il s'attendait à peu près à tout ce qu'il était possible d'envisager. A tout. L'explication importait peu, en fin de compte, ce qui était important c'était que le Sexta n'oublie pas qu'il avait des prérogatives.

Le petit albinos était tout ouïe, écoutant avidement ce que le précheur avat à lui dire. Car le Maitre avait donné des ordres clairs, ceux d'écouter le Rey en toutes circonstances - du moins jusqu'à ordre contraire, et pas sur les sujets d'importance le concernant, l'Empereur ayant depuis un petit moment mieux cerné les limites de sa domination sur sa chose - et d'agir comme un membre assidu de son église. Du coup, pour l'écouter, il l'écoutait. D'ailleurs il avait très bien entendu la question de son supérieur, et y répondit le plus naturellement du monde, comme s'il s'adressait à tout le monde et à personne en particulier - coupant au passage la parole à son roi.

- Ah bah je croyais qu'on m'avait demandé de venir, je...

Mais quelle boulette! Mentionner le nom du Maitre! Lui rappeler l'époque où, encore Menos, il tirait sur commande pour les besoins du chef de l'Exequias! Activer son conditionnement...Et oui, tout aussi naturellement, le Cero partit. Une belle boulette. D'énergie. Dans le mur. Au moins la salle du trône avait de la gueule, maintenant, avec son ouverture sur le soleil interne de la cité. Fallait voir le bon côté des choses, c'était quand même bien plus classe que les vitraux.

- Boum! On demande, on commande. On livre! Désirs sont des ordres. On fait la poule! Cot-cot-cot!

Arrêt sur image. L'arrancar s'accroupissait, les paumes au sol, bras tendus, dans la posture d'un chien calme, à l'écoute.

- J'ai pas compris, de quoi ça s'agissait la question?

Retour à zéro.

- SIIIIIIIIIIIIIIIIIIMA!

L'acoustique de la salle était un rien gachée par le trou béant donnant sur le dehors de l'intérieur, mais bon.

- Et je fais quoi pour Sima? Je veux aider, aider, aider! #ZAP# Mon Capitaine! Vaisseaux klingons en trajectoire d'interception à deux clics! #ZAP# et si on allait cueillir des myrtilles dans les champs? #ZAP# le lapin, le chapeau, le lapin, le chapeau!

Et ça s'enchainait, ça s'enchainait, comme à la foire. Fallait que le Rey trouve quelque chose pour capter son attention. Les coups n'y ferait rien, hausser la voix non plus. Non, il lui fallait de la magie, un truc à apprendre, un truc qui titillerait son âme d'enfant déglingué...on était pas roi pour rien, et lui seul pourrait gérer l'apocalyptique personnalité du fou blanc.

Les Hollows étaient par essence une race chaotique. Leur naissance se faisait dans la douleur et la confusion, leur évolution se faisait dans la mort et la barbarie et leur apogée en tant qu'Arrancar demandait une mutilation douloureuse, leur offrant une puissance inimaginable, leur permettant d'apporter la destruction à des lieues à la ronde.
Ajoutez à cela un léger retard mental, et vous avez ce qui se rapproche le plus de la définition "cataclysme ambulant".

Santo observa le rayon d'énergie, tiré sans raison apparente, comme un spasme qui avait secoué le Sexta. La soudaineté de ce Cero avait éveillé l'instinct de prédation et de survie du Rey, qui sentait l'adrénaline couler dans ses veines. Si Aleksi pouvait cracher comme un hoquet un rayon mortel, mieux valait se tenir prêt. Qui sait si le prochain projectile ne sera pas dirigé directement sur le trône ? Car à en juger par l'ouverture pratiquée dans le mur de la Salle du Trône, mieux valait ne pas en être la cible.

Santo arracha son regard des étoiles désormais visibles depuis son siège - une brèche dans la défense du Palais qu'il faudrait réparer, malgré la vue que cela apportait - et revint vers l'Espada imprévisible, qui venait d'ajouter à la longue liste de ses bêtises "dégâts matériels".
Il était en plein délirium, un de ces égarements où l'Arrancar partait dans une boucle de crétinerie qui ne trouverait jamais de conclusion ; à moins que quelque chose ne vienne l'en arracher. Santo considéra une seconde l'idée de lui peler la peau pour le stabiliser - les barbelés qui glissaient sur la peau du Rey, sous sa soutane, se contractèrent d'excitation - mais il considéra qu'Aleksi n'était au final qu'un chat, demeuré et hyperactif, et qu'il suffisait d'une pelote de laine pour capter son attention.
La flammèche apparut sous le nez du Sexta, dansant devant ses yeux en de petits mouvements de balancier, hypnotiques. Leur chaleur et leur clarté allaient, l'espérait le Rey, faire revenir Aleksi parmi les siens.

« Ici, Aleksi. Concentre-toi. Fixe la flamme. Écoute ton Roi. Tu as disparu pendant un moment Aleksi. Ton Roi veut savoir où tu étais et ce qu'il se passait. Si tu veux aider ton Roi, concentre-toi sur la flamme. »

Santo espérait que l'astuce fonctionnerait. Arriver à canaliser ne serait-ce qu'un peu la folie de l'albinos serait un exploit.

- Ka-poum, kapoum, kapoum, tsoin tsoin!

Tel le fils spirituel de Rémy Bricka, le jeune garçonnet était parti dans une interprétation très personnelle de l'homme orchestre. En l'occurrence, par l'intermédiaire de ses dessous de bras, il donnait la cadence sur un air que lui seul entendait. Enfin, il maintint ce rythme un petit moment, jusqu'à ce que le Rey parvienne à la capter, par le biais d'une petite flammèche.

- Oooooooooh...

Il suivait des yeux le petit mouvement régulier de la loupiote, qui essayait visiblement de le faire entrer en transe. Apparemment la lutte pour la prise de son subconscient était intense, comme pouvaient en témoigner ses pupilles rondes, véritables billes d'abalone qui se dilataient pour se rétracter ensuite, donnant à l'albinos un air de parfait delirium cartoonesque. Une question surgit de l'ombre derrière l'éclatante clarté de la flamme. Pas difficile d'en trouver la réponse.

- J'étais fermé pour travaux.

C'était exact. Tout à fait exact. Il avait eu une absence, rien de moins. Perdu dans la contemplation d'un grain de sable, il s'était...oublié. Pas de quoi fouetter un chat, sauf que l'absence avait duré un moment, le temps pour lui de se faire recouvrir proprement par le sable en provenance directe du Yermo. Et dans une ville qui bougeait comme Nacimiento, c'était un sacré exploit. Encore une preuve que personne n'osait s'approcher du dérangé, par peur des représailles - et donc, par extension, de sa puissance destructrice.

- On est fermé, Monsieur! Elle est où Jeanne? Hmmmmmm...

Il suivait toujours des yeux la flamme, semblant peu à peu perdre sa concentration, en même temps que sa patience. Puis, son front se ridant sous l'effet de la contrariété, l'ingénu décida de mettre fin à la séance en ouvrant une bouche grande comme une caverne, et en avalant purement et simplement l'objet d'hypnose.

Objet qui entreprit bien sûr de lui cramer le gosier.

- BWAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH!

Bah oui, ça piquait un peu. Une chance qu'il avait son trou dans la langue, hein? Bon, on se console comme on peut. En tout cas il changea vite de registre, tout calme comme un ange.

- Hum. Hey! Quand est ce qu'on revoit la Femme Liane? J'aime bien sauver Les Nachos moi.

C'était pas une faute de frappe.

- Héros , héros! #ZAP# On a sauvé la Comté, M. Frodon! #ZAP# Et c'est gagné! KABOOM! Tout ruiné sous le feu multicolore!

Et d'un coup, le changement, encore. Il zappait d'une personnalité à une autre, d'un sentiment à un autre, comme on change de station de radio, avec une facilité déconcertante. Et retour au calme, à la dépression même. L'air d'un enfant perdu, apeuré, certain de se faire bouffer par le monstre sous le lit.

- Ils vont tous m'acclamer, hein? Je suis leur héros, hein? J'ai sauvé la ville, la ville...faut que ça reste comme ça, comme ça...

Fermé pour travaux. Une explication nébuleuse, mais sans doute la plus exacte et la plus limpide que l'on pouvait attendre de la part du Sexta. Santo ne comprenait pas très bien de quoi il retournait, mais il n'avait pas l'impression qu'il s'agissait d'une désertion. Le Rey imaginait plusieurs scénarios pouvant être décrits comme "une période de travaux", mais tous demandaient une conscience de soi et une remise en question personnelle profondes. Autant dire qu'Aleksi n'était pas l'acteur idéal de ce genre de film.

Santo sentit que le stratagème de la flamme perdait de son efficacité. Il avait été surpris d'ailleurs de la réussite de cette astuce, preuve supplémentaire de la simplicité de l'Arrancar. Avant même qu'il n'ait le temps de réfléchir à une solution pour continuer de capter l'attention de l'énergumène, celui-ci se contenta de gober le leurre. Le Rey le regarda, un peu sonné. C'était d'une bêtise incroyable, et pourtant, cela avait très bien fait l'affaire.
Aleksi avait échappé à l'hypnose, mais il en paya le prix. Santo ne put s'empêcher de ressentir un plaisir vicieux en entendant le Sexta brailler pour sa gorge brûlée. Il l'avait un peu cherché, et quel meilleur châtiment que celui que l'on s'inflige soi-même ? Cela calma un peu le Prophète, atténuant son désir de remettre les neurones d'Aleksi à l'endroit à grand jet de flammes.

« La femme-liane ? Riful, peut-être ? Pas de sitôt, je l'espère Aleksi. Elle était une grande menace et je suis très content que tu te sois dévoué à protéger notre peuple. Nous comptons tous sur toi pour nous aider à vaincre nos ennemis. »

Santo était conscient de la vertu des encouragements envers les simples d'esprit. Ils ne discernaient que rarement l'hypocrisie ou l'exagération et se contentaient d'être galvanisés par le compliment. Tout ce qu'il fallait, pour Aleksi. Car, malgré sa nature de chien fou incontrôlable et irraisonné, il restait excessivement puissant, un des plus forts de ses éléments. Mieux valait s'assurer sa diligence et son obéissance.
Aleksi passa d'un éclair à l'exaltation de ce qui semblait être son souvenir du combat à une mine déconfite, presque attendrissante. Santo se demanda si, derrière cet explosif tempérament sans ligne directrice clairement établie, il n'y avait pas quelqu'un d'un peu plus sensible. Très difficile à dire ; à vrai dire le Rey s'attendait à tout moment à le voir se déshabiller et jouer de la musique avec certains éléments de son anatomie. Mais il y avait peut-être là une faille à exploiter, une craquelure qui permettrait de s'assurer un peu de contrôle sur cette créature.

« Comme je viens de te le dire, ta participation au combat contre Riful a été très appréciée et tous mes sujets t'en remercient. Et pour que cela dure, il ne tient qu'à toi de toujours être présent pour Las Noches et Nacimiento, et pour ton Roi. De devenir plus fort, pour pouvoir tous nous protéger et devenir le héros des Hollows. »

Toujours en rajouter. Aleksi était dans la démesure. Autant jouer sur la même gamme.

Son Rey était fier de lui, il se faisait beurrer par le Rey. Mais le Rey avait du cul, car il avait à disposition une arme toute prête à être utilisée par ses soins. Car il avait mentionné une chose à laquelle l'Alexandrov aspirait, comme tout autre animal de son origine: la quête du pouvoir. Peut être que ses motivations étaient différentes de tout le reste, puisque pour lui cette recherche était surtout inconsciente, régulée par le principe fondamental de l'évolution des espèces. La force lui assurait l'impunité, la liberté de faire ce qu'il entendait. Cependant, son récent status de héros de la ville le reliait à cette quête tout naturellement, aussi l'enthousiasme de l'albinos revint de plus belle.

- Oh oui! Plus fort plus fort plus fort une courgette plus fort plus fort! J'aimerais ça oui, on aimerait tous ça...#ZAP# aux aaaaarmes! #ZAP# et pour faire un délicieux poulet basque au piment d’Espelette...

Il était reparti dans son délire, ayant tout bonnement oublié le point de la discussion. Son manège dura un temps, jusqu'à ce que dans le dos du Pastor, une silhouette sorte de l'ombre, assise sur son trône aux formes torturées. Le Seigneur dans l'Ombre, celui qui n'était encore apparu que récemment, et qui terrifiait le petit Arrancar au plus haut point, celui là ouvrit les yeux, et transperça l'âme du jeune homme, qui stoppa son manège, et se mit à trembler de tous ses membres. Jetant un regard inquiet vers son supérieur, il chercha à se rassurer.

- Ou...oui. Plus fort. Il faut que je sois plus fort. Je suis l'épée de Sima, hein?

A ses côtés pendait son sabre de cavalerie, qu'il n'avait pratiquement jamais brandi. Alors que le regard acéré s'étrécissait, celui-ci l'amena à le contempler un moment. C'est ainsi que le petit homme le sorti du fourreau, le brandissant devant le Rey.

- Je suis l'épée de Sima! Son épée et son bouclier! J'arrive, ils meurent! Et je les fourre, ça oui! Je les fourre!

La pression se relâcha.

- On tranche, on taillade! Coupe, coupe, coupe! Carte et quinte, de toux! AH AH! Scouic scouic scouic...aïe!

Il venait tout juste, au milieu d'une passe, de se foutre un coup dans les jambes. Rien de bien méchant, mais cet accident était révélateur de son inaptitude à utiliser le bout de fer sensé représenter son status d'être évolué, une partie de son pouvoir complètement laissée à l'abandon. Une petite voix lui souffla que cela devait changer, et il acquiesça intérieurement.

- Comment qu'on coupe les gens convenablement?

Santo se retint à grand peine de plonger son visage dans sa main et de maudire le jour où Aleksi avait échoué à Las Noches. A peine le Rey avait-il réussi à captiver son attention, celle-ci s'était de nouveau envolée comme un papillon, et le Sexta était reparti dans les landes de la folie douce. Rien ne semblait à même de lui faire garder un peu de sérieux. Le Roi songea un instant à la trépanation comme remède miracle, autant pour la condition d'Aleksi que pour ses propres nerfs, mais il réalisa que l'Arrancar était sans doute capable d'une régénération irréprochable. Santo refusait de croire que personne n'avait à ce jour tenté de lui arracher les tripes à mains nues.

Il se calma cependant soudainement, sans raison apparente. Encore un des grands mystères de son soldat. Santo le regarda dégainer son arme, et l'observer comme s'il la découvrait tout juste. De leur combat contre Riful, il n'avait pas vraiment vu tout le panel de compétences du jeune chien fou, mais il semblait principalement versé dans les rayons d'énergie. Et à voir la maîtrise qu'il avait de son sabre, Santo ne devait pas beaucoup se tromper. Le Rey se dit que le guerrier était pour l'heure plus apte à décapiter un de ses alliés qu'à transpercer un ennemi.

« Si tu veux devenir l'épée de Sima, il va en effet te falloir travailler ta maîtrise de l'épée. Je n'ai pas à proprement parler de sabre, mais... »

De sa manche glissa, tel un reptile, une chaîne de Hierro aux bords acérés, qui tomba comme un serpent, en ondulant. Difficile de dire si c'était Santo qui le faisait se tortiller ou si c'était l'arme qui le faisait d'elle-même ; en tout cas, lorsqu'il redressa le bras devant lui, la chaîne se tendit et se durcit, se transformant en une tige solide, semblable à une lame comme celle d'Aleksi.

« Cela devrait faire l'affaire. Comment couper les gens convenablement, à présent. Essaie de te tenir immobile une seconde, Aleksi. Pas bouger, » ajouta-t-il, simplifiant au maximum les consignes.

Il passa la lame près du corps du Sexta et la plaqua en des endroits clés. Intérieur de la cuisse. Flanc. Cou. La lame se posait, frissonnante, sur les parties que Santo énumérait en même temps à voix haute. Le Rey sentait la chaîne de barbelés siffler, se battant contre sa volonté pour faire saigner le Sexta. Il essayait de rester impassible, tout en luttant contre l'envie de pratiquer directement sur l'idiot impossible à maîtriser.

« Il faut viser les parties molles. C'est le moyen le plus simple de faire saigner ton adversaire. Trancher un os demande plus de force que découper de la chair. Plutôt que trancher une jambe, tranche l'artère fémorale. Plutôt que percer un cœur, vise les reins. Et si tu veux en finir rapidement, tranche la tête. »

Un début, les bases, selon le Rey. Cependant, il se demandait si parler de frappes précises et réfléchies à Aleksi était la meilleure des idées.