« Les Rires du Dédale »

→ Il n’était pas rare que les gens se perdent dans l’enceinte de la forteresse. Comme Dark avait choisit de s’installer dans l’une des ailes les plus profondément recluses du palais, et elle par la même à ses cotés, il arrivait régulièrement que la demoiselle tombe sur les plus piètre cas de mauvais sens de l’orientation qu’avaient jamais donné Las Noches. Naezka s’amusait toujours de voir ces gens errer dans les couloirs, rêvassant ou au contraire profondément mécontent d’avoir perdu leur chemin. Tout Arrancars qu’ils étaient, plus d’un se retrouvait impuissant face au dédale. Quelle frustration ils ressentaient alors ! Capable de déplacer des montagnes, mais de beaux abrutis lorsqu’il s’agissait de retrouver leur chemin. (Enfin, elle savait qu’en vérité, son « maitre » n’était pas plus doué en la matière, mais il avait soigneusement prit le temps de retenir le chemin pour ne rien laisser paraitre, fier comme il était !)
Face à ces pauvres ères, la serpente éprouvait une jouissance secrète. Elle adorait les voir sortir de leur gond pour quelque chose d’aussi idiot, et s’amusait de les voir se sentir, au fond d’eux même, si bête. Quand elle le pouvait, elle ne manquait pas une occasion de les taquiner : c’était chose aisée, et elle ne craignait rien. Non pas parce qu’ils n’allaient rien lui faire (loin de là), mais tout simplement parce que quoi qu’ils lui fassent, elle se régénèrerait sans mal.

Un sourire étira les lèvres de la demoiselle alors qu’elle entendait des pas raisonner dans le couloir : ca n’était pas Dark, elle reconnaissait toujours sa démarche. Non, c’était un pas vif (et non nonchalent), plein de détermination, et qui raisonnait si fort dans le couloir d’à coté qu’elle devinait sans mal que les talons, aussi petits soient ils, devaient être durs et légèrement prononcé. Oui, elle pouvait partir du principe qu’il s’agissait d’une femme. Qu’a première ouïe, elle ne connaissait pas encore. Une femme certes, mais pas une fleur délicate et gracile pour autant, et qui plus est passablement agacée. Comme tant d’autres, elle c’était perdue. Comme tant d’autre, elle était impuissante face au dédale. Les murs blancs se ressemblaient tous (bien que pas tout à fait), et même s’ils étaient inertes, elle les entendait dans sa tête rire d’elle. Ils avaient encore gagnés : ils gagnaient toujours.
Ou du moins, très souvent. Surtout avec les nouveaux venus. Il y avait un avantage à cette supériorité de l’immense château, c’est qu’elle permettait à la Fraccion de reconnaitre qui étaient les nouveaux venus, d’évaluer leur concentration et leur sens de l’orientation au nombre de leur perdition, et évidemment de faire connaissance.

Avec calme, vêtue de la combinaison blanche à Lanières qui la caractérisait pour beaucoup (alors qu’elle préférait ne pas la porter, et même ne rien porter du tout en fait) la reptilienne se leva du lit de son Espada sur lequel elle avait une fois de plus prit place en son absence. Il était temps de découvrir le minois de l’heureuse perdante !
D’un geste caressant, Naezka ouvrit la porte qui la séparait du couloir, et passa la tête par l’embrasure. Natrix et Naer tournèrent aussitôt la tête vers l’inconnue : dos à elle déjà, elle avait la nuque très blanche, la silhouette maigre, et les cheveux très roux. Naezka aimait bien les femmes, même si elle les préférait, pour une raison inconnue, plus petites. Intellectuellement, elle était toujours plus proche de celle qu’elle avait été avant de mourir, une femme déjà mure, même si son enveloppe ayant subit des mues paraissait désormais plus jeune. Sa langue émit un léger sifflement, mimique qui lui était restée de son ancienne enveloppe.

→ Alors jolie rouquine, on est perdue ? |

« Les Rires du Dédale »

→ La jeune femme s’était retournée d’un geste sec pour la foudroyer du regard. Voilà ce à quoi Naezka s’était attendue, en fait. Mais il n’en fut rien, et au lieu de cela, l’inconnue sembla se retourner presque avec enthousiasme pour lui offrir –bien que l’expression de son visage fut neutre- une attitude qui avait quelque chose de souriant. Il fallait croire que la jeune femme était un peu trop habituée aux réactions haineuses…
Au contraire même, ses manières étaient avenantes et elle reconnaissait, presque sans honte, qu’elle était bel et bien perdue. Pour une fois, Naezka tombait sur une personne un peu moins imbue d’elle même que les autres, sans doute… Et en plus de cela, elle était polie ! Chose encore plus inhabituelle dans le « quartier ». Un sourire se glissa sur les lèvres de la jeune femme. Non pas parce que la nouvelle venue lui était sympathique –bien qu’elle le fut plutôt- mais parce qu’elle faisait soudain de ce qui avait été une pique un compliment. Et voila qu’elle tournait la raillerie en mondanités, et la complimentait à son tour. Autant dire que la Fraccion ne s’était guère attendue à cela ! Flattée cependant, elle haussa les épaules, détournant légèrement le regard. On ne lui faisait jamais de compliments. Au contraire même, sa nature reptilienne inspirait souvent le dégout, et pour beaucoup, elle demeurait plus un monstre qu’une femme. Enfin…

→ J’ignore si la Tercera a d’une femme autre chose que le corps. Enfin, qui sait. Merci. |

Le ton avait quelque chose de catégorique, très neutre, mais ca n’était qu’une apparence. Il était extrêmement rare qu’elle ait recours à ce mot là. Son entourage comme sa nature ne lui en laissaient que peu l’occasion, et finalement, elle était presque troublée. Mais elle n’en laissa rien paraitre, caressant du bout des doigts la tête de Naer qui se frottait dans son cou.
Elle n’avait pas vu le discret sourire qui s’était glissée sur les lèvres de son interlocutrice l’espace d’un instant, trop concentrée sur ses pensées. Chassant la légère gêne qu’avait produit sur elle le compliment (qui pourtant pouvait très bien être on ne peux plus faux), elle pensait à ces deux adjectifs « Farouche et Brutale ». Brutale… Peut être, mais farouche ? Elle ne se considérait pour sa part comme telle. Si la violence faisait partie d’une certaine manière de sa personne, cela n’était pas du fait de son « espèce ». Et pourtant, être à la fois femme et Arrancar n’était pas sans conséquences. Pour peu qu’on y réfléchissait, les hommes n’avaient pas ce problème. La « virilité » qu’on leur prêtait spontanément était moins contradictoire avec leur nature de « monstre »… Elle fut interrompue dans ses réflexions par la nouvelle intervention de la rouquine. Un sifflement s’échappa d’entre ses lèvres, les deux couleuvres sortant de sa nuque effectuèrent de concert un petit mouvement rappelant une courbette.

→ Naezka Coalt, Fraccion du Segunda Espada. |

En prononçant le mot Fraccion, elle créait entre elles un lien, peut être même une complicité. Elles étaient liées par une condition commune, et de ce fait un peu « collègue ». Et lorsque Naezka annonçait de qui elle était la Fraccion, elle éprouvait toujours une grande fierté : il avait beau n’être que Segunda, Dark était à ses yeux le meilleur, et lui seul « la méritait ». Parce que pour rien au monde, la demoiselle ne se serait asservie à qui que ce soit d’autre. Lui seul avait gagné son respect.

→ Nous sommes dans la partie la plus profonde de Las Noches, et c’est la que se trouvent ses appartements. Situ veux regagner le hall principal, il faudra…. Retourner sur tes pas, prendre a droite, a gauche, marcher le long du couloir jusqu’à l’avant dernier tournant a droite, tourner encore a droite, continuer tout droit, prendre la 4ème grande porte à gauche et longer le couloir avec les fenêtres rondes jusqu’à la grande porte. Mais si tu souhaites te rendre à un endroit en particulier … ? |

« Les Rires du Dédale »

→ Mais qu’y avait il de plus beau que la destruction ? Fort peu de choses aux yeux de Naezka, et cela expliquait très certainement beaucoup de chose. Elle ne pouvait que succomber aux charmes d’une explosion, de ses tintements et de ses odeurs, d’un mur qui s’effondre ou du sol qui se retourne… Et par extension, à celui qui en ces lieux l’incarnait presque.
La Fraccion au teint aussi pâle qu’aux cheveux vifs savait en tout cas caresser dans le sens du poil, et c’était tout naturellement que Nae préservait son large sourire aux lèvres. De cette rencontre qu’elle n’entamait qu’à peine, la demoiselle en effet tirait déjà une impression tout à fait positive. Elle se plaisait à regarder la jolie chevelure contraster avec le teins laiteux, et flotter dans les airs un instants par mèches lisses lorsqu’elle se relevait de ses courbettes. Elle était aimable, et même particulièrement polie pour une habitante de Las Noches… C’était une qualité qui se faisait, malheureusement, bien rare… Mais qui la mettait de ce fait en valeur. Ce fut donc tout naturellement que la serpente accepta d’un hochement de tête le service qu’on lui demandait.

L’Arrancar marchait avec une légère avance sur la rouquine, et avait déjà passé le premier virage a droite, lorsque celle-ci reprit la parole. Elle tendit l’oreille pour écouter son interlocutrice avec soin, réfléchissant déjà a ce qu’elle pourrait lui dire sur son « maitre »… parmi les choses que l’on pouvait dire sans se compromettre vis-à-vis de l’autorité en place. Après tout, les informations n’étaient pas légion pour en faire l’éloge. Il était puissant, oui… Et bien plus intelligent qu’il s’en donnait l’air. Mais ca, devait elle le dire ? A une inconnue, pas forcément. Savoir qu’il méritait amplement sa place de Primera, qu’il était plutôt solitaire et qu’il ne se laisserait pas marcher dessus suffisait amplement. Naezka n’eut pas l’opportunité de se prononcé cependant, son attention se trouvant soudain séduite par un toute autre sujet. Tournant la tête vers Zora pour en croiser le regard et ralentissant le pas, elle haussa les épaules.

→ Non malheureusement ! La longueur de mon existence ne le permet pas… Mais une précédente moi peut être ? Qui sait, si mon âme n’est pas celle de Quetzalcoatl ayant traversé les millénaires…|

Elle émit un rire léger. A vrai dire, la question l’intriguait elle aussi depuis quelques temps, et elle avait bien essayé de se renseigner… Sans grand succès. Pourtant, elle n’ignorait pas que son apparence, d’autant plus du temps ou elle était Adjuchas, correspondait parfaitement au titre de « serpent à ailes d’argent ». De même, Nae était consciente que le nom qu’elle portait aujourd’hui n’était pas celui qu’elle avait porté de son vivant, et pourtant s’était imposé de lui-même à elle alors qu’elle n’avait pas même encore souvenir de cette mythologie lointaine. Réminiscence ? Peut être bien, mais encore fallait il savoir de quoi… Se pouvait il que cela soit inscrit au plus profond de son âme, par de là ses « autres existences » ? La question l’intéressait…
Tout comme le faisait celles que soulevaient les propos de son interlocutrice.

→ Mais... Tu veux dire que tu serais à l’origine du virus de la peste ? Ce fléau qui a ravagé des pays entiers ? |